La rage narcissique autogynéphile dans les relations publiques, Partie II
Le récit mythique qu’ils protègent
Quel est le point commun de tous les hommes autogynéphiles influents qui veulent être considérés légalement comme des femmes, hormis le fait d’être des hommes blancs hétérosexuels issus de carrières militaires, universitaires, scientifiques et techno-industrielles ? Ils sont misogynes. Ils adhèrent tous, sans aucune exception, à divers degrés, aux stéréotypes sexistes misogynes. En effet, la seule conception de femme qui ne fait pas appel aux constructions culturelles de la féminité patri/viriarcale, de la féminité définie en relation avec la valeur suprême de la masculinité virile, c’est simplement « femelle de l’espèce humaine ». Femme est le mot qui désigne la femelle humaine de l’espèce humaine. Toute autre définition est culturellement construite et fait appel aux stéréotypes misogynes. Ces hommes sont extrêmement attachés à la notion métaphysique « d’essence féminine » ou « d’éternel féminin », car c’est par celle-ci qu’ils justifient leur travestissement — leur attirance pour les vêtements typiquement féminins.
Aucune femme ne connaît « l’urgence irrépressible » d’appliquer du rouge à lèvres ni de l’excitation sexuelle en enfilant une paire de collants. Des cliniciens transactivistes, dont Charles Moser, ont tenté de fabriquer une étude visant à montrer que les femmes pouvaient être autogynéphiles. Leur étude fut aisément démontée à cause d’une erreur incroyable : l’oubli de l’élément érotique. En effet, ces hommes ont cherché à prouver que les femmes aussi pouvaient être autogynéphiles, c’est-à-dire, sexuellement excitées à la simple idée qu’elles sont des femmes, en omettant le paramètre de l’excitation sexuelle. De la grande science. Charles Moser en est toujours aujourd’hui à bricoler des articles très académiques tels que « It Helps If You Stop Confusing Gender Dysphoria and Transvestism » (« Ce serait plus pratique si vous arrêtiez de confondre dysphorie de genre et travestissement »), dans le seul but de pouvoir manger la poussière et de marquer contre son camp (le camp de la religion de l’éternel féminin). Le comble étant que Bailey conçoit une origine biologique et génétique ainsi qu’une influence culturelle, et en conséquence, argumente en faveur des chirurgies cosmétiques pour certains autogynéphiles ! Le seul résultat qui compte pour Bailey, c’est le bien-être de ces hommes.
En effet, il était courant que toute mention d’érotisme de travestissement chez les patients des cliniques « du genre » jusqu’aux années 2010 soit rédhibitoire à l’élection aux chirurgies cosmétiques génitales (dites de « réassignation sexuelle »). La notion quasi religieuse « d’essence féminine » infusée à la naissance prévalait, ainsi que celle de « vrai trans » (true transsexual) en opposition au transsexuels hétérosexuels avec un fétichisme de travestissement. Or, Bailey (Blanchard et Lawrence) ont au contraire argumenté que les chirurgies pouvaient être bénéfiques pour les « transsexuels non homosexuels », c’est-à-dire, les hommes paraphiles autogynéphiles. Je ne considère en aucun cas que des chirurgies mutilantes et la prise d’hormones à vie puissent être un « résultat positif », de la même manière que je ne le considérerais pas d’une anorexique enfin satisfaite de n’avoir plus que la peau sur les os, ou encore d’un apotemnophile qui déclare une meilleure qualité de vie depuis son amputation des deux jambes. Je me range du côté du sexologue Ken Zucker. Ultimement, je ne me préoccupe pas de ce que des hommes adultes souhaitent faire de leur pénis, du moment qu’ils ne l’utilisent pas pour violer des femmes et des enfants, et du moment qu’ils ne décident pas de détruire les droits des femmes pour leurs privilèges sexuels. Ce qui n’est malheureusement pas le cas, autrement, je serais en train d’écrire sur Monica Sjöö ou Gerda Lerner, et non sur les paraphilies masculines.
Les transactivistes ont été prompts à juger le livre à sa couverture.
Constructivisme social ou déterminisme biologique ? La réponse est « oui ».
Bailey considère que le phénomène des hommes homosexuels très « féminins » apparaît parce que les cultures humaines les acceptent. Le qualificatif de « féminin » est employé mal à propos[1]. En réalité, la majorité des cultures viriarcales (hormis certaines théocraties islamiques) les acceptent, il s’agit d’une constante dans les sociétés centrées sur les hommes. L’Iran, en tant qu’exemple de théocratie islamique, rejette l’homosexualité, et l’alternative pour les hommes gays est de « transitionner » chirurgicalement ou de mourir ; au Pakistan et en Inde, en revanche, des fonctions socio-sexuelles spécifiques (spirituelles, religieuses) sont attribuées aux hommes « féminins ». Mais ce phénomène montre aussi l’existence d’une variation biologique suffisamment présente dans la population humaine au travers des cultures viriarcales : « La régularité interculturelle des transsexuels homosexuels et des drag-queens est très évocatrice d’une influence biologique fondamentale qui transcende la culture » (The Man Who Would Be Queen : « L’homme qui voulait être reine », que nous mentionnerons dorénavant par « TMWWBQ »). Lorsqu’il parle de drag-queens et de transsexuels transcendant les cultures, il ne veut pas dire que les autres cultures ont des hommes qui performent du « drag » ou des hommes « transsexuels » considérés comme tels. Ces cultures ont leurs propres rôles socio-sexuels, et leurs fonctions et significations n’ont rien à voir avec celles des drag-queens et des transsexuels dans notre culture.
Les cultures humaines (viriarcales ou égalitaires) vont déterminer la manière dont se manifestent les comportements sexuels qui surgissent naturellement, en les contraignant ou en les amplifiant et, le plus souvent, en les amplifiant parce qu’elles les contraignent. Si les homosexuels « féminins » ne constituaient pas une menace pour le mythe de la masculinité virile, ils ne représenteraient pas un enjeu culturel aussi important. L’exemple de la Grèce antique est très parlant : l’homosexualité y était mal tolérée dès lors que l’homme pénétré devenait adulte, aussi, les homosexuels adultes qui continuaient d’avoir des relations d’éromènes avec des hommes plus virils (érastes) étaient mal vus. Autrement dit, dans des sociétés égalitaires et/ou matricentrées, il n’y a pas de raison de faire tout un plat du comportement sexuel des hommes « féminins » : ils ne menacent aucun mythe.
Alice Dreger, dans son essai « The Controversy Surrounding The Man Who Would Be Queen: A Case History of the Politics of Science, Identity, and Sex in the Internet Age » (« La controverse autour de TMWWBQ : Un exemple de la politique de la science, de l’identité et du sexe à l’ère d’Internet ») rétablit la conception de Bailey en ces termes :
Ainsi, alors que les deux perceptions erronées courantes sont que Bailey rejette toute idée de transsexualité innée et qu’il rejette toute idée d’importance de la culture, il situe en fait ce que l’on appelle la transsexualité MTF (le désir de changer de sexe d’homme à femmes [p. 144]) sur un spectre de variations de sexualité masculine induites biologiquement, lequel, dans notre culture, inclut les personnes qui sont finalement identifiées comme des hommes gays féminins, des travestis, des drag-queens et des transsexuels. Le choix du rôle dépend de l’interaction entre la biologie, l’expérience et le milieu culturel de chaque individu.
[Nous mettons en gras]
Le bémol ici est que Bailey ne considère pas la « transsexualité » comme étant innée, c’est l’homosexualité et le comportement sexuel d’un homme qui sont biologiquement déterminés et dont les diverses manifestations seront influencées par son environnement culturel et familial. Je ne pense pas qu’il serait en désaccord avec le fait que l’idée de « transsexualité » innée soit un non-sens : il parle d’hommes dont la masculinité est différente, par des causes développementales qui se produisent lors de la détermination du sexe du fœtus, pendant la « bataille de l’empreinte parentale ». Bailey ne croit pas à « l’identité de genre », il ne se soucie pas, dans son analyse, de la manière dont les hommes interprètent leurs propres comportements ni de leurs « sentiments ». Ce qui l’intéresse, et ce à quoi il s’attache, c’est leurs comportements, leurs actions, leurs choix de vie, peu importe les récits que ces hommes se font — tout en ayant énormément de tact et de compassion, d’admiration même, pour ses sujets.
Bailey, qui est en accord avec Zucker sur l’influence de l’environnement économique et social, remarque que parmi les homosexuels « féminins », ceux qui deviendront simplement des adultes gays (plus ou moins flamboyants) et ceux qui se travestiront et rechercheront des chirurgies cosmétiques peuvent s’anticiper en fonction de leurs milieux culturels et familiaux. Bailey a fait le constat qu’une majorité d’homosexuels transsexuels étaient d’origines latines, issus d’une culture très machiste et dont les pères étaient généralement extrêmement désapprobateurs des comportements non virils de leurs fils ; qu’ils étaient des garçons qui finissaient par couper les ponts avec leur famille, qui recevaient donc peu de soutien familial et qui faisaient l’expérience du rejet familial. Il conjecture que les garçons « féminins » des familles blanches américaines progressistes, dont les parents offrent plus d’acceptation et de soutien (souvent par la médiation de la mère envers un père réticent), plus propices à poser un « cadre » de normes qui permettent à leurs fils d’investir dans un avenir plus conventionnel (« oui tu peux jouer à la poupée et mettre une robe de princesse à la maison, mais il ne vaut mieux pas que tu amènes tes poupées à l’école ou que tu t’habilles en princesse pour l’anniversaire de ton ami » « Mais pourquoi ? » « Parce que c’est comme ça. »), grandiront en devenant des hommes gays « féminins ».
Homosexuels transsexuels ou hétérosexuels autogynéphiles ?
Ci-dessous, un petit questionnaire qui vous permettra d’évaluer quel type de travestis sont les hommes médiatiques mis en avant dans les émissions TV populaires. Sont-ils de classiques homosexuels « transsexuels » ? Ou sont-ils des autogynéphiles qui se disent transgenres, parce qu’il est bien plus politiquement correct de raconter que « depuis tout petit, je me suis senti femme » plutôt que d’avouer « vers 12-13 ans, j’ai commencé à me masturber dans les culottes de ma mère » ? Le premier récit correspond au mythe de « l’essence féminine » ou de l’éternel féminin que dénonçait Simone de Beauvoir et dont la citation est toujours tronquée et fallacieusement interprétée par les transactivistes[2]. C’est la principale raison pour laquelle les hommes transidentifiés autogynéphiles (des hommes qui ont effectué une transition sociale, gardant le plus souvent leur pénis et leurs testicules par choix et non par refus des chirurgiens — ce qui pouvait être le cas au début du siècle) ont vilipendé et calomnié J. Michael Bailey afin de détourner l’attention de son livre TMWWBQ, quand bien même l’argument qu’il fait tout au long du chapitre consacré à l’autogynéphilie est en faveur des chirurgies de réassignation sexuelle pour les hommes atteints de cette paraphilie.
Le questionnaire est élaboré par Bailey au chapitre « Transsexuels autogynéphiles ou homosexuels, comment les distinguer ? ». Vous pouvez y répondre si vous connaissez le curriculum vitae et relationnel de l’homme que vous voulez évaluer. Prenez par exemple les personnalités médiatiques françaises. Notez qu’il ne s’agit pas tant d’un questionnaire sérieux adressé aux personnels médicaux en clinique « du genre » que d’insister sur le fait que les deux types d’hommes qui se disent transgenres sont en réalité très différents et constituent deux catégories remarquables, chacune avec des caractéristiques distinctives généralisables à l’ensemble des cas. Évidemment, il existe autant d’histoires personnelles et d’interprétations personnelles que d’hommes travestis, mais ce ne sont pas les interprétations personnelles et les sentiments intimes de ces hommes qui intéressent le clinicien – et qui nous intéressent également – c’est ce que ces hommes font. Autrement dit, lorsqu’il s’agit de profiler un homme, et cela, les féministes radicales le savent parfaitement, il ne faut pas écouter ce qu’il dit, mais regarder ce qu’il fait. Ce sont les actes d’un homme, et non ses paroles, qui vous montrent ce qu’il est.
« Si Blanchard et moi avions rencontré cent transsexuels, je serais surpris que nous soyons en désaccord sur plus de deux. Mais la plupart des lectrices et lecteurs n’auront jamais rencontré un seul transsexuel de l’un ou l’autre type, et même la plupart des cliniciens qui voient des patients transsexuels n’ont pas l’habitude de penser à eux de cette façon. Quoi qu’il en soit, vous ne pouvez pas simplement demander à quelqu’un “De quel type [de trans] êtes-vous ?”.
J’ai élaboré un ensemble de règles qui devraient fonctionner même pour les novices (bien que je ne les aie pas testées, je le reconnais). Commencez à zéro. Posez chaque question, et si la réponse est “oui”, ajoutez le chiffre (+1 ou -1) à côté de la question. Si la somme atteint +3, arrêtez ; le transsexuel à qui vous parlez est autogynéphile. Si la somme atteint -3, il est homosexuel. [Bailey dit “elle”. Il parle au masculin pré-transition et au féminin post-transition. Puisque je suis méchante, nonobstant les injonctions à “be kind!” je genre grammaticalement selon le sexe réel, et non selon les sentiments des hommes].
+1 Avez-vous été marié à une femme ?
+1 Lorsque vous étiez enfant, les gens pensaient-ils que vous étiez à peu près aussi masculin que les autres garçons ?
+1 Êtes-vous presque autant attiré par les femmes que par les hommes ? Ou plus attiré par les femmes ? Ou êtes-vous aussi peu intéressé par les unes que par les autres ? (Ajoutez 1 si vous avez répondu “oui” à l’une de ces questions).
+1 Aviez-vous plus de 40 ans lorsque vous avez commencé à vivre à plein temps “en tant que femme” ?
+1 Avez-vous déjà porté des vêtements “féminins” en privé et, à trois reprises au moins, avez-vous été sexuellement excité au point de vous masturber ce faisant ?
+1 Avez-vous déjà été militaire, policier, chauffeur routier, programmeur informatique, homme d’affaires, avocat, scientifique, ingénieur ou médecin ?
-1 Votre partenaire idéal est-il un homme hétérosexuel ?
-1 Dans votre enfance, les gens pensaient-ils que vous étiez un garçon très “féminin” ?
-1 L’affirmation suivante vous correspond-elle ? “Je trouve l’idée d’avoir des relations sexuelles avec des hommes érotiquement excitante, mais l’idée d’avoir des relations sexuelles avec des femmes ne m’attire pas du tout”.
-1 Aviez-vous moins de 25 ans lorsque vous avez commencé à vivre à plein temps en tant que femme ?
-1 Aimez-vous regarder des photos d’hommes torse-nu et très musclés ?
-1 Avez-vous travaillé comme coiffeur, esthéticien, drag-queen, modèle photo de lingerie ou prostitué ?
Enfin, si la personne prend des hormones de synthèse depuis au moins six mois, posez-vous la question suivante :
Si vous ne saviez pas déjà que cette personne était transsexuelle, auriez-vous soupçonné qu’elle n’était pas une femme “native” (natal woman) ?
+1 si votre réponse est “oui” (si vous vous en doutiez).
-1 si votre réponse est “Non”.
Gardez à l’esprit que les gens [hommes] ne disent pas toujours la vérité. Les résultats du questionnaire pourraient être faussés si le transsexuel est en fait autogynéphile, mais (a) il craint que vous le jugiez ou que vous refusiez d’accéder à sa requête de changement de sexe en ayant connaissance de la vérité, ou (b) est obsédé par le fait d’être une “vraie” femme [et ne déroge pas à son jeu de rôle, car ce serait invalidant pour son plaisir et pour son identité personnelle]. »
Les ajouts entre crochets sont les miens.
[2] https://www.partage-le.com/2022/11/23/chers-ideologues-trans-arretez-de-falsifier-la-pensee-de-simone-de-beauvoir-par-audrey-a-et-nicolas-casaux/