Masculinité, animes et dysphorie de genre
Une analyse de l’identification transgenre induite par les médias.
Je vous présente le texte traduit et commenté d’un homme se décrivant comme ayant été autogynéphile par le passé qui a cherché à expliquer, au travers de sa propre expérience de consommation d’animes (dessins animés japonais), les divers mécanismes psychosociaux qui, selon lui, semblent l’avoir conduit à manifester de l’autogynéphilie et une dysphorie de genre corrélative.
Cet homme a cherché secours auprès de certaines lectures féministes. Il semble avoir lu des extraits d’Andrea Dworkin, féministe radicale, et à l’antipode, des extraits de textes de Bell Hooks - dont la pensée tient les femmes pour responsables du patriarcat au même titre que les hommes, et les invite à faire passer les sentiments des hommes avant les luttes des femmes, et à refuser toute alliance avec des femmes d’autres classes et d’autres ethnies (je développe dans le corps du texte).
Évidemment, l’auteur fait appel à de nombreux poncifs patriarcaux et antiféministes, sans en avoir conscience : nous ne pouvons que constater sa bonne foi et sa sincérité. Ce pourquoi nous proposons une traduction commentée où nous complétons et parfois contredisons son propos par nos connaissances en analyse féministe radicale, en mécanismes psychotraumatiques et en paraphilies masculines.
Tenez le pour acquis, les hommes n’ont définitivement pas besoin des femmes et des féminismes adjectivés pour se trouver des excuses et tenter de faire appel à la socialisation des femmes à l’himpathy (le fait d’être plus sensibles à la souffrance des hommes qu’à leur propre détresse et à celle des autres femmes). Je pense que mes commentaires l’intéresseraient probablement. Mais ma priorité est de donner des outils analytiques aux femmes féministes, aux femmes en relation avec des hommes autogynéphiles et aux mères de garçons adolescents découvrant leur autogynéphilie et se croyant « transgenre ».
Masculinité, animes et dysphorie de genre
Posté le 2019-10-20 par Social Justice Wizard
Une analyse de l’identification transgenre induite par les médias.
Toute personne qui se prêtera à effectuer quelques recherches au sujet de la polémique transgenre remarquera tôt ou tard qu’un très grand nombre de jeunes hommes transidentifiés sont fans d’animes, qu’ils utilisent des images de filles d’animes comme avatars sur les réseaux sociaux, qu’ils partagent des mèmes liés à des filles d’anime kawai (mignonnes), et ainsi de suite. Jusqu’à présent, aucune statistique ni étude ne vient étayer ce propos (ce serait un sujet bien étrange à étudier), mais la corrélation est si forte qu’elle ne peut être une simple coïncidence. Ayant passé plus de 5 ans dans la communauté animes de 4chan, et ayant développé une forme moyenne d’autogynéphilie et de dysphorie de genre pendant cette période, je vais présenter, dans cet article, une théorie sur la dynamique sous-jacente à ce phénomène.
En effet, il n’était pas inhabituel que des utilisateurs du forum « Anime & Manga » de 4chan se rendent sur le forum LGBT pour y demander explicitement : « est-ce que les animes m’ont rendu trans ? » [Une même question peut se poser pour les jeunes filles et les animes de type YAOI et Boy’s love. C’est un autre sujet que je développerai le temps venu. NdT] Voici un exemple typique de fil de discussion où de nombreuses personnes admettent l’existence d’un lien de corrélation [ce sont de jeunes hommes en majorité écrasante. Les filles passent par d’autres forums, notamment des forums de rôle-play. NdT] :
https://archived.moe/lgbt/thread/7538520/
Bien sûr, leurs théories varient, et ceux qui sont convaincus par l’idéologie de l’identité de genre disent qu’ils ont simplement « découvert » qu’ils étaient trans après s’être mis aux animes, car ils ne croient pas qu’il leur soit possible de développer les conditions menant à la transidentification. [Certains gospels trans prétendent en effet que l’on nait avec son identité de genre, qui est une sorte d’âme sexuée distincte du corps. Il s’agit évidemment de dualisme philosophique, le même qui sous-tend les religions judéo-chrétiennes. NdT]. Ils pensent que l’on ne peut que naître trans.
Un ancien utilisateur « cis » de 4chan raconte comment il a commencé à s’identifier à une fille d’anime.
[Le mot cis est un terme idéologique demandant l’acceptation de l’existence d’une chose appelée « identité de genre » (une âme sexuée distincte du corps) et dont tout le monde serait porteur, un peu comme des signes astrologiques qui ne se rapporteraient à aucune constellation d’objet céleste. Selon cette idéologie, un homme « cis » est un homme dont l’identité de genre est alignée avec son corps sexué. NdT]
Pour bien comprendre le phénomène, ou du moins ma théorie à ce sujet, il faut commencer par une analyse de la socialisation des garçons à la masculinité.
Masculinité
Le stéréotypage des humains en fonction de leur sexe commence avant la naissance. [Les comportements des adultes envers les enfants, même dans leur manière de s’adresser à un fœtus dans le ventre de sa mère, sont déjà normatifs. Les stéréotypes sexistes commencent avant la naissance, ou plutôt, sont perpétués tout au long de la vie. NdT]
Oui, avant la naissance.
Je mettrai à jour cet article si je parviens à retrouver l’étude, mais en gros, des scientifiques ont observé la réaction des parents lorsqu’un bébé donne des coups de pied dans le ventre de sa mère, et ont découvert que si les parents savent que le bébé est de sexe masculin, ils sont plus susceptibles d’attribuer les coups de pied au fait que le fœtus est un garçon et donc, qu’il est censé être plus actif physiquement par nature.
Mise à jour (28.05) : Il se peut qu’il ne s’agisse que de cette étude de cas qu’une chercheuse a réalisée sur elle-même. [Une étude plus récente traitant de cette problématique a été réalisée sur 29 femmes : https://www.jstor.org/stable/44014700. Cette étude, très intéressante, nécessiterait un plus large échantillonnage. NdT]
Une autre étude a révélé que les adultes stéréotypent les enfants en fonction de la tessiture de leurs cris. Les cris graves sont attribués aux garçons, tandis que les cris aigus sont attribués aux filles. Lorsque le sexe de l’enfant est connu, la tonalité est supposée signifier le caractère féminin ou masculin de l’enfant. Lorsqu’un enfant de sexe masculin pleure avec un ton aigu, on présuppose qu’il s’agit d’une cause plus grave que lorsqu’un enfant de sexe féminin fait de même, car on présuppose que les enfants de sexe féminin pleurent dans une tonalité plus aiguë.
[Et c’est ainsi que commencent les inégalités de traitement des femmes par le corps médical. Les femmes sont considérées comme étant plus douillettes alors que c’est l’inverse qui est vrai : elles attendront plus longtemps avant de consulter en dépit de la gravité de leur condition et manifestent une résistance à la douleur bien plus grande que les hommes. Le corps médical se rend coupable du biais corrélatif : aux urgences, les femmes attendent plus longtemps que les hommes, ceux-ci étant pris en charge plus rapidement en dépit d’une gravité de condition équivalente. Votre consœur n’échappe pas aux statistiques : lors de mon passage aux urgences, j’ai réalisé un bingo. 3h d’attente suivies d’une engueulade monumentale par le chirurgien qui ne comprenait pas pourquoi j’avais attendu aussi longtemps avant de venir. La réponse est que c’était supportable, jusqu’à ce que je ne puisse plus marcher. J’ai attendu de ne plus pouvoir être autonome et d’être paralysée par la douleur pour me faire conduire aux urgences parce que, sans cela, ce qui m’arrivait ne me semblait pas si grave (ça l’était pourtant). Nous sommes également socialisées à souffrir en silence et à endurer. Cela fait partie de notre conditionnement à la subordination. Nous sommes tellement insouciantes et girly, n’est-ce pas ? Il y a les croyances liées à la socialisation à la masculinité virile : « les hommes doivent souffrir en silence » et il y a la traduction de ces croyances dans la réalité face à l’épreuve des chiffres qui ne trompent pas : la souffrance des hommes est prise plus au sérieux que celle des femmes alors que ceux-ci sont plus douillets et que les femmes minimisent la gravité de leur souffrance par conditionnement, contrairement aux premiers. NdT]
Je montre ces exemples sans pour autant prétendre que les enfants commencent à être affectés par les stéréotypes sexuels avant ou dès la naissance. Je ne suis pas un expert en développement neurologique, mais je suppose que les bébés aussi jeunes n’ont pas la capacité de traiter la manière dont les autres se comportent à leur égard au-delà d’un niveau très basique [en fait, les nourrissons et jeunes enfants absorbent littéralement les humeurs et comportements des personnes qui les entourent. Leur survie en dépend. NdT]. Ce que je veux dire, c’est qu’au moment où l’esprit d’un enfant est suffisamment développé pour répondre à un tel traitement stéréotypé, le stéréotypage est déjà en cours. Nous ne pouvons même pas passer les premières phases de notre développement mental dans un environnement exempt de stéréotypes sexuels. Notre psychisme se forme dans un environnement rempli de stéréotypes sexistes et s’y développe dès le premier jour.
En ce qui concerne les stades ultérieurs à la petite enfance, je ne sais pas s’il existe des études, mais je suppose que mes affirmations sont relativement peu controversées : observez comment les parents, et peut-être les hommes en particulier, interagissent avec les garçons qui commencent à peine à marcher et à parler, et vous remarquerez probablement que les attentes en matière de masculinité sont déjà présentes. Éventuellement, on apprendra au garçon à être fort, actif, à s’affirmer, à être roi. S’il est docile, passif, doux ou autrement « féminin » voire « efféminé », il sera accueilli avec désapprobation ou déception. Les préférences en matière de jouets sont contrôlées : non, tu ne veux pas jouer avec le poney à la crinière scintillante ou avec la poupée Barbie aux longs cheveux avec sa jolie robe, ce sont des jouets pour filles. Les vêtements sont contrôlés : seules les filles portent des robes et des jupes mignonnes, roses et froufroutantes, ou des t-shirts avec des petits chatons, des princesses ou autres motifs stéréotypés…
Mon intention n’est pas de donner une leçon de base sur l’éducation genrée. Certainement pas aux personnes aguerries aux théories féministes, toutes ces choses sont en fait très basiques. Je veux plutôt attirer l’attention sur un aspect en particulier de l’éducation masculine, ayant trait à notre sujet.
Une grande partie de la socialisation masculine consiste à étouffer les émotions positives qui sont considérées comme féminines, et d’empêcher de nombreuses manières de penser et de nombreux comportements qui permettent simplement à une personne de se sentir entière, parce ce que ces comportements et façons d’être sont considérés comme féminines.
[Comme de nombreux hommes, l’auteur ne voit toujours qu’une seule face du patriarcat et manifeste une absence d’empathie, une incapacité à se mettre à la place des filles réelles, ou ne serait-ce qu’à s’intéresser à ce que vivent les filles réelles, à ce qu’est réellement l’expérience qu’une petite fille a du monde qui l’entoure et du type de socialisation qui lui est imposé. Ils ne peuvent que se projeter encore et toujours dans une féminité totalement fantasmée par et pour eux-mêmes et ignorent complètement les mutilations psychiques et sexuelles auxquelles sont soumises les filles. NdT]
Je suis loin d’être le premier à le souligner. Andrea Dworkin en a parlé si je me souviens bien (c’est probablement en la lisant que j’ai pris conscience de tout ceci). La brillante Bell Hooks, comme je l’ai découvert récemment, explique la même chose dans les termes suivants :
« Le premier acte de violence que le patriarcat exige des hommes n’est pas la violence envers les femmes. Au contraire, le patriarcat exige de tous les hommes qu’ils s’engagent dans des actes d’automutilation psychique, qu’ils tuent les parties émotionnelles d’eux-mêmes. Si un individu ne réussit pas à se mutiler émotionnellement, il peut compter sur les hommes patriarcaux pour mettre en place des rituels de pouvoir qui attaqueront son estime de soi. »
Bell Hooks
[Bell Hooks n’est pas une penseuse féministe, sinon au sens de « féminisme adjectivé » : elle considère en effet que le féminisme doit aider les hommes et ne peut se penser ni se faire sans eux. Dans ses livres, elle prône l’alliance avec les hommes de sa communauté contre les féministes blanches de la deuxième vague dont elle tire un portrait fantasmé et caricatural hypermisogyne (oisives, ennuyées, etc.) Elle prône l’alliance aux hommes avant l’alliance avec d’autres femmes et est contre les espaces non mixtes. Le titre d’un de ses derniers livres : Feminism is for everybody (« le féminisme est pour tout le monde »), est d’ailleurs l’un des mantras du féminisme adjectivé dit libéral (les autres étant : islamique, intégral-catho…) qui positionnent le lien aux hommes comme étant primordial. Les luttes des femmes sont secondaires à celles que mènent les hommes : antiracisme, anti-capitaliste, etc., et requiert même la soumission des femmes aux hommes, lesquels ont été privés de leur masculinité par les Blancs, les capitalistes, etc., et donc, pour sauver leurs frères, les femmes leur doivent la soumission. En cela, Bell Hooks est bien plus proche de la pensée de Houria Bouteldja — qui demande aux femmes de sa communauté de ne pas dénoncer les hommes qui les violent, pour ne pas faire le jeu des Blancs — que d’aucune féministe.
Hooks a intériorisé tous les poncifs misogynes contre le féminisme : les femmes blanches sont misandres, anti-hommes, féministes extrémistes, etc., ce que l’on ne rencontrera pas chez d’autres féministes noires ayant pensé l’intersectionnalité, comme Audre Lorde ou Angela Davis. Hooks déleste les hommes de leurs responsabilités et accuse les femmes, les tient pour responsables des émotions des hommes. Elle n’a aucune analyse systémique du patriarcat et des instruments patriarcaux. Si elle perçoit l’exploitation raciste, l’exploitation sexuelle est pour elle un mystère : elle défend la famille patriarcale traditionnelle. Les idées de Hooks sont évidemment très populaires auprès des masculinistes, et sa pensée est galvanisante pour les hommes qui peuvent ainsi se dire féministes, en ce qu’elle ne fait que remettre les femmes au service des intérêts masculins, et les empêcher de se penser en dehors de l’hétéronormativité et de la famille patriarcale. Dans l’extrait cité par l’auteur, depuis sa position de femme socialisée au soin des hommes, elle ne perçoit qu’une seule face du système, car l’acte de violence dont elle parle, et qui semble uniquement tournée vers les hommes, est pourtant d’abord et avant tout porté contre les femmes. Le patriarcat (les hommes adultes) enseigne d’abord aux garçons à haïr les femmes et tout ce qui va leur être associé (rassemblé sous une représentation de « la féminité »), pour pouvoir étouffer ces émotions en eux.
C’est le principe de séparation : pour les différencier des femmes, il faut d’abord leur inculquer que les femmes sont mauvaises et que tout ce qui est féminin est donc mauvais, puis les faire tuer tout ce qui est socialement assigné aux femmes parce que c’est considéré comme non-masculin, donc mauvais. Cet enseignement est en fait délivré quasi simultanément. Mais la désignation du féminin comme étant haïssable doit précéder la mutilation psychique, pour que celle-ci puisse avoir lieu.
Il échappe également à Hooks que lorsque le patriarcat enseigne la restriction et la passivité aux jeunes filles, il leur enseigne en même temps l’automisogynie et l’infériorisation d’elles-mêmes, et la soumission aux hommes qu’elles doivent aimer, admirer et servir. Pour cela, il faut donc inculquer aux femmes la haine du féminin, la haine de ce qu’elles représentent dans leur culture, représentation qu’elles intériorisent, et à vénérer le masculin, à vénérer ce que représentent les hommes dans leur culture et les valeurs qui sont associées à la masculinité. Aussi, le principe du patri-viriarcat, c’est avant tout la haine des femmes. La misogynie est au fondement de tout viriarcat.
Chez les Massaïs, depuis la destruction de leur système économique et social traditionnel par l’Occident qui a imposé le patriarcat par la redistribution des terres en faisant des hommes les seuls détenteurs des biens ; avant la colonisation, les femmes étaient propriétaires de terres et de troupeaux), un tournant culturel hypermisogyne s’est installé en conséquence. Aujourd’hui, les rituels d’initiation des jeunes hommes consistent à renier leur mère, à l’insulter, la battre et lui cracher dessus. Le jeune garçon n’est accepté parmi les hommes qu’à la condition d’humilier et rejeter sa mère. Il devra se comporter de la même manière avec son épouse.
Bell Hooks, comme de nombreuses femmes, est ici sujette à l’himpathy : elle est plus sensible aux sentiments des hommes qu’aux violences qui lui ont été faites et manifeste un déni important quant à la primauté de la misogynie, de la haine des femmes dans la construction de la masculinité homophile. NdT]
Pour élaborer : le garçon doit être bruyant et actif, donc il ne peut pas se détendre. Il doit s’affirmer, ce qui signifie conflit et stress en permanence. Il ne peut pas être trop gentil — même vis à ce de ce qu’il aime — faudrait pas qu’il se comporte comme une pédale non plus ! — La situation s’aggrave lorsque les garçons commencent à se ridiculiser, à s’ostraciser et à s’intimider les uns les autres en raison de leur efféminisation perçue.
[Les garçons ne sont pas opprimés en tant qu’ils sont des garçons, ils sont maltraités selon une hiérarchie de classe, dès l’école, que cette hiérarchie soit économique ou basée sur la force brute. Les hommes ne sont pas opprimés en tant qu’ils sont des hommes, mais en tant qu’ils sont pauvres, chétifs ou de couleur (dans les sociétés occidentales, mais pas seulement, les ethnies oppriment d’autres ethnies qui sont en infériorité économique et sociale) ; les filles en revanche, sont maltraitées à l’école par les garçons parce qu’elles sont des filles. Et les femmes exploitées parce qu’elles sont des femmes, pour leur système reproducteur. NdT]
C’est à ce moment-là que cela devient vraiment douloureux. Bien sûr, la socialisation masculine signifie apprendre à être l’oppresseur dans le cadre du patriarcat, mais pour le garçon individuel, en particulier celui qui n’a aucune prédisposition naturelle aux caractéristiques attendues de la masculinité, qui est plutôt doux et gentil par nature, le rôle qu’on attend de lui le conduira à sa perte.
[Et cela n’est pas de notre responsabilité, c’est la responsabilité des hommes. Ce sont les hommes qui n’acceptent pas de diversité dans la masculinité et qui relèguent une partie des hommes qui n’y correspondent pas dans la catégorie des « femmes » en Occident et dans la catégorie « non-hommes » ou « ni hommes ni femmes » dans les sociétés traditionnelles. Notons aussi que cet homme en particulier fait appel à l’émotion des femmes et à leur socialisation à faire passer les sentiments des hommes avant leur propre bien être, avant leurs droits et leur sécurité. La plainte masculine est un instrument de l’oppression. L’homme qui souffre demande que les femmes lâchent tout ce qu’elles étaient en train de faire pour accourir à ses pleurs. Les garçons sont socialisés à l’histrionisme : à ce que leur moindre bobo requiert, l’attention non pas des autres hommes, mais des femmes ; et en général, les femmes accourent. NdT]
Pour beaucoup de garçons, le résultat est une répression et un refoulement massif. Vous devez refouler toutes les émotions positives. Même si vous n’êtes pas très actif, vous ne pouvez jamais vous détendre ni profiter du calme ; au lieu de cela, vous boudez avec un visage sinistre.
[En fait, à cause des animes, cet homme et les garçons qui en consomment, pensent qu’être une fille, c’est être insouciante et légère, rire tout le temps, alors que la réalité est tout l’inverse : les filles sont éduquées à ne pas être exubérantes, à ne pas se salir, à ne pas s’agiter et à réprimer leur vitalité. Cet homme, qui pense avoir une analyse « féministe » de sa situation passée, montre surtout une vision fantasmée de l’enfance en tant que fille, vision que les animes kawai lui ont inculquée. NdT]
Si vous osez ressentir la moindre joie, surtout, n’allez pas l’exprimer en éclatant d’un rire sincère, car le rire est seulement réservé pour exprimer votre victoire sur un rival que vous venez de dominer — sinon, vous vous adonnez à un comportement de fille frivole.
[Encore une fois, ce sont des valeurs transmises par les shonen japonais, les animes traditionnellement destinés au garçons et non par le patriarcat occidental. Cet homme a visiblement passé son adolescence online à baigner dans les sous-cultures japonaises. NdT]
Les démonstrations d’affection et les caresses, c’est pour les filles et les pédés, donc vous ne devez laisser personne vous toucher. Si vous n’avez pas les moyens d’être le glorieux héros masculin, vous devenez le drone sans émotion, le gamin déprimé et morose indifférent à presque tout, mais au moins, vous n’êtes pas une fille.
Ceci décrit plus ou moins fidèlement la majeure partie de mon enfance, de mon adolescence et de mes années de jeune adulte. Aujourd’hui, je dois regarder une même dynamique entraîner mon jeune frère, un garçon très doux, tout comme je l’étais.
Bien sûr, le refoulement ne fonctionne jamais complètement. Le garçon se retrouve avec une envie profonde de tous ces sentiments jugés « féminins ». Une envie de profiter à nouveau de la vie. D’être autorisé à profiter de la vie, même.
[Alors que chez les filles, ça fonctionne. Elles sont mutilées psychiquement, puis mutilées sexuellement à l’adolescence par des garçons biberonnés au porn violent. Il n’est pas étonnant de les voir tenter d’échapper aux stéréotypes sexistes en voulant devenir « des garçons ». NdT]
Et maintenant, faisons un tour dans la sous-culture des animes.
Des filles mignonnes qui font des trucs mignons.
Des personnages principaux de Yuyushiki en train de faire des trucs mignons.
C’est littéralement un type d’animes. Fréquemment abrégé en CGDCT (cute girls doing cute things — des filles mignonnes en train de faire des trucs mignons).
Exemples célèbres : Azumanga Daioh, K-On !, YuruYuri [le YURI est un type d’anime figurant des relations amoureuses et sexuelles entre femmes], A Channel, Hidamari Sketch, Non Non Biyori, Yuyushiki, Gochuumon wa Usagi Desu ka, Yama no Susume, et la liste est longue. Ce ne sont que des exemples parmi tant d’autres.
Officiellement, leur genre tend à être répertorié comme comédie et « tranche de vie ». La tranche de vie est parfois aussi appelée iyashikei, un mot japonais qui signifie littéralement « guérison ».
Miyako de Hidamari Sketch. L’un des meilleurs anime de l’histoire, pour être tout à fait honnête.
En général, tous les personnages principaux sont des femmes. Les personnages masculins sont plutôt rares, voire totalement absents. Le contexte se situe souvent dans un lycée de filles ou quelque chose comme ça.
Et tous les personnages sont des guimauves sur pattes de mignonneries ultra-girly qui passent leur temps à exprimer leur joie de vivre avec un maximum d’exubérance et de drama, en somme, à représenter les stéréotypes de la féminité existant dans la culture japonaise. Les personnages de ces animes présentent des versions purifiées, aseptisées et hautement idéalisées de la féminité.
[Et ceci est très éloigné des stéréotypes sexistes représentant les filles de la culture occidentale, beaucoup plus sobres : « sages comme des images ». le kawai (« mignon ») est un stéréotype féminin typiquement japonais. NdT]
Alors, on peut dire que c’est un peu comme Mon Petit Poney et les « Bronies », non ? Des hommes adultes qui créent une sous-culture autour de dessins animés destinés aux jeunes filles ? [Bronies = Brothers (frères) of My Little Poney (=de Mon Petit Poney). Que l’un des plus célèbres dessinateurs de Mon Petit Poney soit en prison pour possession de pédopornographie n’a rien d’une coïncidence. NdT]
Eh bien, pour être exact, ce n’est pas tout à fait le cas. Ces animes (figurant des filles mignonnes) sont faits pour les hommes. Le public cible officiel est le plus souvent « seinen », c’est-à-dire des garçons adolescents et des jeunes hommes, parfois même des hommes plus âgés. [Le public « shonen » étant celui des jeunes garçons, et « shojo », celui des jeunes filles. NdT] C’est aussi la raison pour laquelle les personnages féminins sont fréquemment sexualisés de manière plus ou moins grossière. (Je ne vais même pas commencer à aborder l’aspect pédophile de la chose).
Les Japonais semblent avoir parfaitement réussi à transformer la féminité refoulée des jeunes hommes en profit.
D’ailleurs, cette représentation des personnages féminins n’est pas propre au CGDCT. Les comédies romantiques, les animes d’action et tous les genres d’animes contiennent fréquemment des personnages féminins de même nature. [Effectivement, la culture japonaise est hypermisogyne et faite par les hommes pour les hommes. Mais ça, c’était avant. Depuis un peu plus d’une quinzaine d’années, les animes et mangas figurants des garçons et des hommes, ayant notamment des relations romantiques et sexuelles entre eux, ont fait leur sortie. Originellement très marginaux et destinés aux homosexuels (le genre YAOI), ils sont maintenant destinés aux jeunes femmes et dessinés par des femmes. NdT].
Il n’est pas nécessaire de plonger dans le sous-genre du CGDCT pour être baigné dans ces représentations d’hyperféminité exubérante. Il suffit de regarder n’importe quel anime.
Inari avec les renards divins. Un de mes personnages préférés de tous les temps. Avec un max de mignonnerie, et un max de guérison.
Pour le garçon solitaire aux émotions réprimées, se plonger dans un tel anime est avant tout un moyen de se laisser aller aux joies de la féminité d’une manière qu’il juge acceptable.
[Une féminité issue de l’imaginaire masculin et qui n’existe pas. Il s’agit en réalité d’une masculinité interdite. Il n’y a pas d’équivalent en ce qui concerne les YAOI et le Boy’s Love destiné aux filles. Au contraire, ce n’est pas tant la représentation d’une féminité « interdite », mais d’amour autrement impossible dans le monde réel : un amour entre égaux, ou le sexe n’est pas un facteur d’inégalité, ou les relations de pouvoirs entre inégaux ne sont pas liées au sexe, mais à d’autres combats surmontables et desquels les héros triomphent. Toutefois, il existe également un genre où les rapports de domination sont très similaires aux stéréotypes hétérosexuels traditionnels, et où l’homme le plus faible, le plus jeune et le plus petit physiquement est traité comme la « fille » de l’histoire. Le fait qu’il s’agisse d’un homme anesthésie la violence du rapport de domination et rend les relations d’inégalités attrayantes pour les filles, et donc, les prépare à accepter leur rôle subalterne. D’un côté, il y a donc les genres de YAOI qui leur permettent de se projeter dans des histoires où elles peuvent littéralement « sortir de leur sexe », pour paraphraser de Beauvoir — et des stéréotypes sexistes qui y sont associés — pour se projeter dans des relations sexuelles égalitaires et vivre toutes sortes d’aventures, et de l’autre, les genres de YAOI qui vont les préparer à accepter les stéréotypes d’infériorité en leur permettant de s’identifier à un homme ou un garçon efféminé, qui a le rôle du « sub » — soumis/subalterne. Dans les deux cas, la féminité n’est jamais valorisée. Dans le premier genre, elle est effacée, dans le second, elle est renforcée. Aucun modèle de féminité transgressive des stéréotypes ne leur est présenté. NdT].
Il n’est peut-être pas tout à fait acceptable socialement pour les jeunes hommes de regarder des animes « girly », mais le fait de savoir que cette sous-culture est typiquement créée par des hommes et que ces animes sont « officiellement » destinés aux jeunes hommes constitue une justification suffisante pour leur permettre de surmonter leur peur interne de se laisser aller à regarder des trucs « girly ». De plus, les personnages féminins sont non seulement faits pour être adorés, mais ils sont souvent aussi très sexualisés, ce qui fournit une justification supplémentaire de conformité à la masculinité [c’est acceptable parce que c’est érotisé, on voit des petites culottes et de gros nichons, donc c’est suffisant pour les hommes qui peuvent aussi regarder ces animes pour ces raisons et pas seulement parce qu’ils aiment les trucs mignons. NdT]
Au bout du compte, étant donné que la fille d’anime représente toutes ces émotions refoulées en pur concentré de mignonnerie, et étant donné que le garçon se laisse de plus en plus entraîner dans l’anime, il finit par ressentir le désir envahissant de devenir comme elle. [Le même désir se fera ressentir pour les filles qui s’identifient à leur héros d’animes ne figurant que des garçons ayant, entre autres, des relations romantiques. NdT] Il s’identifie très fortement à cette fille toute mignonne. Il finit par admettre qu’il a toujours voulu être doux et gentil comme elle, insouciant et joyeux comme elle, profiter pleinement de la vie sans les lourdes chaînes de la masculinité, comme elle.
[La féminité vu par les hommes, encore une fois. Les filles qui grandissent en sociétés misogynes n’ont rien d’insouciant ni de joyeux, au contraire. Leur quotidien est le harcèlement sexuel et les méchancetés de la part des garçons qui se moqueront de leurs « règles » et de tout ce qui a trait au fait qu’elles sont des femelles humaines. Ce qui permet d’ailleurs à d’autres garçons de jouer aux protecteurs et chevaliers servants, et auxquels elles se sentiront redevables. Elles apprennent à craindre la violence des garçons et tout en même temps à rechercher leur approbation, elles développent des troubles de l’alimentation et un hypercontrôle sur leur apparence en devant y consacrer beaucoup de temps : rien de moins insouciant que tout cela, bien au contraire. NdT]
Et c’est ainsi que la croyance en une « identité de genre féminine » commence à se former.
À ce stade, je me dois de faire une petite digression.
Je n’ai pas d’explication exhaustive de la raison pour laquelle cette identification peut également conduire au développement de l’autogynéphilie — pourquoi le garçon commence à désirer être sexuellement passif et soumis, devenant même « pseudo bisexuel » selon les termes de Blanchard, alors qu’il est originellement hétérosexuel.
[Ces garçons baignent littéralement dans une sous-culture virtuelle au moment de la puberté. Leur imagination érotique se forge tandis qu’ils sont exposés à ces animes. De la même manière, d’autres garçons baignent dans la pornographie au même moment de leur vie, et forgent ainsi leur imagination érotique, ou plutôt, la formate à la pornographie violente et misogyne envers les femmes : la majorité tireront leur satisfaction sexuelle à l’idée de brutaliser les femmes, lorsque certains retireront leur plaisir sexuel à l’idée d’être à la place de ses femmes. La pornographie conduira ces derniers au sissy porn, un type de pornographie destinée aux hommes et mettant en scène des hommes forcés à la soumission, forcés à être « féminisés ». Une autre appellation du sissy est d’ailleurs « féminisation forcée ». C’est tout bonnement l’influence, la réception aux messages culturels dans lesquels ces garçons baignent. Les animes se « bingent », s’avalent à la suite, épisode après épisode, en série, pour ceux qui sont socialement inactifs dans le monde réel et dont les cercles amicaux sont exclusivement virtuels. NdT]
Bien sûr, la masculinité interdit strictement et tout particulièrement la soumission sexuelle (surtout la soumission à d’autres hommes), donc s’il y avait un désir naturel de soumission, ces sentiments seraient refoulés avec les autres, mais pourquoi un garçon hétérosexuel lambda aurait-il des sentiments de soumission sexuelle en premier lieu ? (Je doute qu’aucune personne ait d’ailleurs « naturellement » de tels sentiments).
***
[Effectivement l’auteur revient sur la désignation de soumission « naturelle », qui provient de notre culture en particulier, ou les relations de pouvoir, genrées et stéréotypées, sont « érotisées », c’est-à-dire associées à la sexualité de manière à conditionner une réponse sexuelle normée de la part des hommes et de la part des femmes. Réponse sexuelle des hommes à la soumission des femmes, et réponse sexuelle des femmes à la domination des hommes. Ceci est propre à notre culture industrielle patriarcale, mais pas à toutes les sociétés viriarcales.
Dans de nombreuses sociétés traditionnelles viriarcales, agraires ou pastorales, il n’y a pas d’érotisation des relations de pouvoir : elles sont tout simplement inculquées de la manière la plus brutale qui soit, l’homme doit se montrer brutal et briser toute résistance de la part de sa future épouse, et ce comportement n’est jamais présenté comme étant excitant sexuellement, mais comme allant du devoir de l’homme. Le viol, dans ces sociétés, n’est pas présenté comme quelque chose d’excitant pour les hommes, mais comme l’accomplissement de leur devoir et de leur masculinité. Les femmes ne sont pas conditionnées à l’excitation traumatique, elles sont tout bonnement brisées, car tel est leur lot, celui de la souffrance et de la soumission. Ci-après un extrait de L’arraisonnement des femmes, essais en anthropologie des sexes, réunis par Nicole-Claude Mathieu. Il s’agit d’un tour rapide d’introduction de différents procédés culturels pour la mutilation psychique des femmes et leur soumission aux hommes, laquelle nécessitant ces dispositifs brutaux et répétitifs, prouve bien que la soumission des femmes n’a rien de naturel. Elle doit au contraire être conditionnée à l’aide de divers procédés épouvantables visant à les briser psychiquement.
1) L’« apprentissage » du coït
Je ne m’attarderai pas sur les formes de socialisation des filles à l’acceptation du coït, et particulièrement du coït lorsque le mari le requiert. Ces règles sont matière d’une éducation diffuse tout autant que d’enseignements directs et ponctuels, par exemple au cours des rites d’initiation, de mariage, etc. (cf. Richards 1956 ; Wilson 1957, 1977). Elles sont bien connues aussi pour les sociétés occidentales tant anciennes que modernes (Flandrin 1976, 1981). Sur le même plan se situent les idéologies qui définissent les femmes comme faites pour la procréation, la maternité comme la véritable fonction des femmes et par contre la stérilité comme abominable, ou encore le sexe comme la seule ou la vraie richesse des femmes (cf. par exemple Echard 1981 ; Schneider 1955)76. Tous ces moyens de pression psychique sont assez connus et répandus pour qu’il ne soit pas nécessaire d’y insister. Mais il faut aussi considérer comme dressage préalable à l’acceptation des relations sexuelles conjugales et à la reproduction, les formes nombreuses et diversifiées d’apprentissage institutionnel des rapports sexuels (cf. infra, p. 104 sq.).
Et pourtant le dressage psychique ne suffirait pas à obtenir la soumission générale des femmes. La menace de la violence, l’usage de la force achèvent leur conditionnement. En tout cas, en employant des degrés variés de contrainte et de violence, les hommes se chargent d’obtenir la conformité de celles qui à un moment ou à un autre essaient d’échapper à la règle. Qu’on voie par exemple la diffusion des formes de viol, ou le viol à peine masqué (pratique du moetotolo à Samoa : cf. Mead 1975 : 61 ; Freeman 1983 ; ou du motoro à Mangaia : cf. Marshall 1971 : 128) dans les zones paradis de la sexualité, ou plus encore, la pratique du viol collectif à Mangaia pour obliger les filles « hautaines » à se soumettre aux garçons (Marshall, ibid. ; et sur la sexualité en Polynésie, cf. Ortner 1981)77
Car c’est bien par des « traitements de choc » (Roheim 1933) qu’on nous « brise la résistance » (Berndt 1962 : 170), qu’on nous « brise l’esprit » (Williams 1969 : 163), traitements et procédés « destinés explicitement à domestiquer l’esprit récalcitrant » (Williams, ibid.) des femmes dans maintes sociétés78. Il en est ainsi du viol collectif qui dans certaines sociétés de Nouvelle-Guinée est, selon un auteur (Berndt 1962) qui en donne une description détaillée, un traitement « designed to give her a liking for intercourse, to break down any resistance on her part and to make her feel at home » (tout commentaire m’est impossible)79. Viol employé aussi contre toute forme d’insoumission des femmes (cf. Murphy & Murphy 1974) et dont la menace est présente pour prévenir toute résistance.
Telles sont aussi les initiations basées sur les mutilations sexuelles des filles comme les rites australiens où la jeune fille est enlevée de force par un groupe d’hommes, déflorée avec un couteau de pierre, puis soumise à la copulation de plusieurs hommes, ce qui doit la rendre « tranquille » une fois pour toutes (Roheim 1933 : 234-236 ; cf. aussi Spencer et Gillen 1927 ; Roth 1897)80.
Et telles aussi les violences individuelles codifiées socialement, comme le viol dans les cérémonies nuptiales chez les Tikopia, Gusii ou Hima (cf. Firth 1963 ; LeVine 1959 ; Elam 1973) et, avec plus ou moins de variantes, chez bien d’autres. Les procédures sont multiples. Dans le mariage samburu, décrit par Spencer (1965 : 248), « en moins de 48 heures [la] relation [de la jeune fille] avec son amant est brisée, elle est excisée […], soumise à une longue et exténuante harangue par les aînés. Elle quitte la hutte de sa mère à laquelle elle a été liée pendant toute sa vie en suivant une lente procession qui après son excision est visiblement douloureuse et exténuante. Depuis ce moment, elle est obligée de vivre en contact étroit avec des hommes inconnus qu’elle a appris pendant toute sa vie à éviter en tant qu’aînés ». La fille est, en fait, donnée terrorisée au mari (généralement de 10 à 40 ans plus vieux qu’elle), qui l’amène chez lui : elle se rend compte que tout est dans les mains des anciens et que « le seul moyen de garder une place dans la société, et même tout court de survivre, est d’accepter comme inévitable son changement de statut et son transfert dans un nouveau groupe social » (Spencer 1965 : 248)81.
Que ces traitements soient préparatoires au coït et/ou au mariage comme dans les rites aranda ou dans les autres formes de mutilations sexuelles, qu’ils soient opérés par des agents individuels, mais socialement sanctionnés, ou soient directement collectifs (effectués par le groupe des hommes), qu’ils s’exercent dans la cérémonie de mariage ou qu’ils servent à punir les femmes sur lesquelles l’apprentissage précédent a quelque part échoué (on peut en trouver de nombreuses formes dont il serait possible d’analyser le contexte socio-culturel), ils sont, pour ce qui nous concerne, des variations d’un même modèle, ils poursuivent un même but : le domptage meurtrier des femmes pour en faire des corps-outils de reproduction.
2) La contrainte au devoir conjugal
Toutes les sociétés n’utilisent pas ces moyens pour « développer la sexualité » des femmes. Mais la soumission (l’assujettissement) à la volonté sexuelle du mari est obtenue dans d’innombrables populations non seulement par des moyens de pression psychique, de chantage économique et affectif, mais aussi, et cela est considéré comme parfaitement légitime — c’est un droit du mari —, par les coups. La gravité en est assez variable, mais le droit du mari, de façons diverses selon les sociétés, peut recevoir l’appui social — du moins des hommes — même dans le cas de véritables sévices. Ainsi, dans un cas présenté par Berndt (1962 : 141), une femme, héritée par le frère du mari défunt, refuse le coït avec lui. Après plusieurs tentatives, il la surprend dans son sommeil, lui enfonce un tison d’écorce dans le vagin et la viole. Des hommes accourent aux cris de la femme : il explique qu’elle refusait le coït et que donc il l’a brûlée. Les hommes réprimandent la femme : « Est-ce que tu n’as pas de trou ? Pourquoi as-tu peur de J. ? Tu n’es pas une petite fille. » Plus « modérés », les hommes mangaia considèrent que puisque le mariage « donne le droit de copuler avec ta femme autant que tu veux » et que toutefois les femmes sont moins intéressées au coït que les hommes, il faut bien poursuivre la femme jusqu’à ce qu’elle se soumette « même s’il faut la battre », « la réduire à la soumission par les coups » (Marshall 1971 : 142, 124)82. Chez les Kgatla, les femmes se plaignent souvent que les maris leur imposent le coït même quand elles sont accablées de fatigue et que « si elles refusaient ou résistaient, elles étaient généralement soumises par les coups (usually beaten into submission) ». Comme dit une jeune épouse à l’ethnologue, « si elle avait su ce qui l’attendait, elle serait restée célibataire, parce qu’au moins elle aurait pu choisir quand avoir des rapports sexuels » (Schapera 1971 : 162). La menace des coups est présente dans la vie des femmes !kung (Shostak 1983 : 150 sq., 311 sq. et passim) comme des femmes de Buka (Blackwood 1935 : 105) ; chez les Baruya, le refus de faire l’amour avec le mari, comme toute autre forme d’insubordination et de résistance des femmes, est suivi par la répression, la violence physique (coups et blessures) et psychique des hommes, exercée dans ce cas directement par le mari (Godelier 1982). Ce ne sont que quelques exemples pour illustrer un phénomène si répandu que tout effort d’en donner une documentation adéquate est probablement voué à l’échec. Les coups peuvent aboutir au meurtre, de temps en temps relevé dans la littérature ethnologique (Wilson 1977 : 128 ; Shostak 1983 : 311).
La violence et les coups sont aussi parmi les moyens employés contre les femmes qui veulent quitter le mari. La fille guidar mariée en mariage oudaha (mariage primaire) « avait “ la dot sur le dos ” jusqu’à ce qu’elle ait donné un enfant. On pouvait la contraindre à rester par la force jusque-là » (Collard 1981 : 9). Si elle se sauvait avant, le père la cherchait et l’enchaînait « dans sa concession, en lui mettant des morceaux de poterie cassés sur les tempes, attachés solidement pour que cela lui fasse mal et casse son entêtement. Il la privait aussi d’eau et de nourriture quelque temps » (Collard 1979 : 62). Et qu’on ne croie pas qu’il s’agisse du récit d’un malheureux cas individuel : « Presque toutes nos informatrices d’âge mûr ont subi ce mauvais traitement, encore approuvé en 1971 par tous les pères de famille âgés » (ibid.).
Garder les femmes dans le mariage est bien le moyen d’en obtenir le maximum de fécondité, comme semble aussi le montrer Chagnon pour les Yanomamo83. Mais, d’autre part, le meilleur moyen pour les maris de les garder est souvent de les mettre enceintes le plus tôt et le plus fréquemment possible (Collard 1979 : 63 ; et pour les Rukuba, Muller 1981 : 13). Donc : immobiliser les femmes pour les faire engendrer, les féconder pour les immobiliser84.
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Retour à la traduction :
Je pense que les sentiments autogynéphiles sont dérivés du fait de voir une telle performance de soumission sexuelle comme faisant partie de l’ensemble de la féminité glamourisée. Peut-être que la consommation fréquente de pornographie, dans laquelle les femmes sont représentées en train de se soumettre sexuellement et d’y prendre plaisir, amène les garçons à associer inconsciemment soumission sexuelle et plaisir, et une fois que les vannes de la féminité [stéréotypique imaginée par les hommes] sont ouvertes, cela fait également surface. En effet, de nombreux hommes semblent avoir un fétiche autogynéphile de nature plus strictement sexuelle, et qui à son tour a souvent été théorisé (par les hommes qui ont ce fétiche) comme étant lié à la consommation de porno.
[Eh non. L’autogynéphilie a été théorisée par Blanchard avant la massification du porno et chez des hommes qui ne consommaient pas de pornographie. Que la pornographie et le sissy jouent maintenant le rôle de propulseur supersonique ne fait aucun doute. Mais les paraphilies autogynéphiles, qui vont du fétichisme de travestissement au fétichisme anatomique, semblent exister indépendamment de la culture qui les exprime, ou plutôt, ces conditions auront une expression et une sévérité différente en fonction de la culture patriarcale dans laquelle elles vont s’exprimer. NdT]
Il est donc possible que nous ayons affaire à une interaction entre deux processus psychologiques distincts : une association subconsciente, induite par le porno, entre un comportement sexuellement soumis et le fait d’éprouver du plaisir sexuel, conduisant au développement d’un fétiche autogynéphile latent, qui fait ensuite surface en embrassant [la masculinité interdite au travers des stéréotypes de] la féminité, lorsque tout ce qui a été refoulé fait surface et explose avec l’identification à des filles d’animes mignonnes, capables de profiter de la vie.
[Encore une fois, ces jeunes hommes n’ont strictement aucune idée de l’enfer que traversent les vraies jeunes filles dans leur propre société et au-delà. NdT]
C’est peut-être un peu tiré par les cheveux, mais je n’ai pour l’instant pas de meilleure explication pour montrer le lien entre le fétichisme autogynéphile et la théorie des sentiments féminins/positifs.
[Au bout du compte, l’autogynéphilie est aujourd’hui une condition aggravée que les hommes s’infligent à eux-mêmes au travers de la pornographie et des animes qu’ils se destinent et qu’ils créent eux-mêmes. Au lieu d’être réellement transgressifs et de briser les normes sociales de la masculinité virile, ils plongent dans les sous-cultures virtuelles qui ne font que renforcer ces normes en les contraignant à les intérioriser, au point de formater leur imagination et leur désir et de les rendre incapables d’exprimer quoi que ce soit d’autre que ce qu’ils ont ingurgité au travers de leurs écrans. NdT]
Mais revenons à l’identification au féminin et à la dysphorie de genre.
Le garçon qui a réprimé toute sa vie des émotions positives et sa joie de vivre trouve enfin le salut au travers de ces filles d’anime mignonnes qui lui montrent comment vivre pleinement sa vie. Elles lui montrent comment être une personne joyeuse, irradiante de joie et d’amour. Il n’expérience pas un simple attachement superficiel. Il éprouve un sentiment d’attachement profond et sincère, qui le tire enfin de la dépression qu’il a connue toute sa vie.
[Alors, non. Déjà, les animes ne lui montrent pas « comment vivre pleinement sa vie » étant donné que le message qu’il reçoit concerne un archétype de fille fantasmée selon les hommes. Le garçon qu’il est ne sait toujours pas comment vivre sa vie. Ensuite, il ne s’agit pas d’attachement, mais de projection, de dissociation et d’acte de déplacement. Le garçon projette ses émotions réprimées sur la figure de la fille kawai : il ne les éprouve pas en tant que lui-même, mais en tant que lui-même s’identifiant à une fille kawai. Et ceci, c’est un sentiment dissociatif. Il ressent toute sorte d’émotions au travers des personnages de filles mignonnes. Ceci est un acte de déplacement. En cela, sa dépression ne se résorbe pas, mais empire avec le mécanisme dissociatif. Au plus il projette sur les personnages fictionnels, au plus il « déplace » sa détresse en la remplaçant par de la projection (« l’identification » à la fille mignonne joyeuse) au plus il devient anesthésié à sa propre détresse, jusqu’à se décorporer : c’est la dysphorie qui le frappe.
La dysphorie est une pathologie mentale qui survient à force de dissociation d’avec ses propres émotions et son propre corps. C’est un mécanisme de survie psychique qui peut se déclencher en réponse à un choc traumatique ou à une longue spirale dépressive (faisant écho à des traumatismes infantiles ou à une « éducation » dans un environnement violent, par des adultes abusifs). Ce jeune homme, dans cet acte de déplacement — quasi instinctif, pour sa survie — a tenté de traiter sa dépression au travers de son identification à ses héroïnes. La dissociation et l’identification aux filles d’animes constituent plusieurs facettes d’un même phénomène de déplacement traumatique. Les actes de déplacements sont des sortes d’addictions, et les addictions sont des stratégies de survie psychique. Mais celles-ci ne traitent pas l’origine du traumatisme ou du problème : elles sont des « déplacements » du problème, permettant à l’individu de pouvoir continuer à fonctionner pour un temps seulement.
Éventuellement, si le déplacement (l’addiction) n’est pas réellement traité, les comportements résultants mèneront l’individu à s’autodétruire. Que ce soit par la drogue, la pratique obsessionnelle de sports extrêmes dangereux, l’alcoolisme, la pornographie, l’anorexie ou… la médicalisation et les chirurgies mutilantes. Qu’il s’agisse de prise de drogue, d’alcoolisme ou des dysphories telles que l’anorexie et autres dysmorphophobies, le mécanisme est le même et relève d’automatismes de survie. L’autogynéphile n’est pas une addiction en soi, mais lorsque celle-ci devient une obsession monomaniaque prenant le pas sur le restant de la vie des hommes qui en sont atteints, elle emprunte les circuits de l’addiction, ergo en est une. NdT]
C’est pourquoi le garçon commence à ressentir non seulement un malaise compréhensible vis-à-vis de son corps, qu’il trouve laid selon les normes de beauté conventionnelles, mais aussi une contradiction profonde avec ce qu’il découvre finalement en lui-même. Le garçon subissant toujours le lavage de cerveau de l’idéologie masculine [étant toujours sous l’influence des injonctions à se soumettre aux valeurs de masculinité viriarcale exacerbée par sa consommation de kawai. NdT], la conscience de son propre corps provoquera une dissonance cognitive et causera une détresse extrême, car dans ses représentations intimes [à force de binger des animes moisis et de s’enfermer dans un univers virtuel, c’est-à-dire, de perdre contact avec la réalité. NdT] son corps est à l’antipode du moi authentique qu’il a récemment découvert. Si je suis une fille mignonne, douce et joyeuse à l’intérieur, pense-t-il, comment puis-je avoir un corps viril comme celui-ci ? Comment pourrais-je avoir l’air d’autre chose que d’un gros pervers répugnant et tout bonnement ridicule si je devais me comporter comme la fille mignonne que je suis à l’intérieur, alors que je me déplace et bouge dans l’espace avec ce corps masculin ?
[C’est en prétendant être des filles (cf. Dylan Mulvaney) que vous apparaissez comme de gros pervers répugnants, au lieu de transgresser réellement en osant vous comporter comme des hommes de masculinité diverse, non conformes aux stéréotypes socio-sexuels. NdT]
C’est à ce moment qu’entre en scène la dysphorie de genre. Toute votre vie, on vous a appris que vous n’étiez pas censé ressembler aux filles féminines et que vous deviez être un garçon viril, ce que vous détestiez inconsciemment, peut-être au point de nourrir des idéations suicidaires [les filles en ont autant, des idéations suicidaires. Encore une fois, les kawai filles aux cheveux roses qui rigolent tout le temps, c’est un fantasme masculin. NdT]. Ensuite, vous avez découvert que vous étiez vraiment une fille féminine, et vous embrassez pleinement cette idée, mais votre corps masculin est toujours là et gâche tout. Il rappelle aux gens que vous êtes en fait un homme — non, il leur fait croire que vous êtes un homme. Alors vous vous jetez corps et âme dans l’entreprise de modification de votre corps (voire de mutilation) pour lui donner une apparence plus féminine, et à celle de faire entendre aux autres que ce n’est pas parce que vous avez un corps masculin que vous n’êtes pas vraiment une fille.
[On remarquera le fondement idéologique du dualisme esprit/corps, à l’œuvre dans les cultures judéo-chrétiennes et patriarcales en général : l’idée que l’on « possède » un corps et qu’il est distinct de l’esprit. Or, la réalité est que nous n’avons pas un corps, nous sommes notre corps. Tant notre culture dualiste sous-jacente que la massification des communautés virtuelles — allant de pair avec l’isolement individuel et la déconnexion du monde réel, de la nature, des autres êtres de chairs — est un terrain favorable à toutes les dysphories et les psychoses possibles. Une psychose est la perte du lien avec la réalité. NdT]
Arrivé là, on se trouve vraiment dans un état misérable et je ne le souhaite à personne.
Je ne veux pas excuser la misogynie de ce genre de gars. Ce ne sont pas les femmes qui leur ont fait ça, et ce ne sont pas les femmes qui doivent régler ce problème.
[On notera tout de même que cet homme qui a conservé toutes ses représentations fantasmées — à mille lieux des expériences réelles et traumatisantes que vivent les filles en sociétés viriarcales misogynes — a passé tout son texte à essayer de trouver des justification à ses comportements et à s’en dédouaner au lieu de les analyser réellement au sein de la culture patriarcale et misogyne dans laquelle il évolue. NdT]
Un homme transidentifié sur 4chan a exprimé une très forte haine envers sa psychiatre, accompagnée de l’image d’une fille d’anime en colère. Pour une raison qui lui est propre, il croit qu’une dysphorie de genre sévère exclut toute possibilité de manifester les traits d’une condition autogynéphile.
[Or, cet homme extrêmement perturbé dont nous traduisions le commentaire, non seulement manifeste une violence typiquement masculine d’homme élevé en viriarcat, avec idéation de meurtre féminicide sur sa psychiatre qui est une femme, mais manifeste bien plus qu’une indifférence aux expériences réelles des vraies filles : il exprime une haine des femmes, c’est de la misogynie. C’est de l’envie. Cet homme très perturbé est évidemment hétérosexuel, et ressent très probablement de l’excitation sexuelle lorsqu’il parvient à oublier sa dysphorie et s’imagine qu’il est vraiment une femme. NdT]
« Je déteste aller chez la psychiatre, mais c’est obligatoire si je veux continuer d’avoir mes hormones. Elle est tellement hautaine et elle prétend qu’elle comprend ce que je traverse. Quand je lui dis que je ne suis pas du tout heureux de mon apparence, cette sale connasse de merde a l’audace de me répondre que c’est parfaitement normal et que de très nombreuses femmes sont malheureuses de leur apparence. J’ai juste envie de l’attraper par le cou et de la secouer comme un prunier en lui hurlant que mon ossature est complètement merdée. Ma voix pue du cul et j’ai beau de raser de très près j’ai toujours une putain d’ombre de barbe parce que ma peau est tellement pâle [c’est parce que tu ne prends pas assez le soleil et que tu ne vas pas suffisamment jouer dehors. NdT] et mes poils sont vraiment très sombres. En plus j’ai toujours eu un putain de grand front et maintenant je suis terrifié à l’idée de la calvitie. Donc qu’elle aille se faire enculer, parce qu’elle ne sait pas ce que cela fait. Ça n’a rien à voir avec ce que peuvent ressentir ces putains de cis salopes qui chialent parce que leurs chevilles sont trop grosses. Pourquoi je dois souffrir comme ça ? J’aurais préféré être un AGP, ces trous du cul semblent être heureux au moins ! »
[Eh bien. Quelle violence, quelle haine des femmes. On peut ajouter que cet homme manifeste un trait que l’on rencontre souvent chez les AGP : la rage narcissique. Voir Anne Lawrence, lui-même AGP : Men trapped in men’s bodies (« Des hommes enfermés dans des corps d’hommes »). NdT]
Pour conclure, j’ajouterai que les animes kawai ne sont qu’un moyen parmi d’autres de faire ressortir la féminité refoulée. [Encore une fois, il ne s’agit pas d’un moyen d’expression du refoulé, mais au contraire, cela ne fait qu’empirer et intérioriser la répression de ces émotions qui ne deviennent acceptables qu’à la condition de ne pas être un homme et de se percevoir comme une fille. C’est ce qui conduit à la dissociation et à la dysmorphophobie. NdT] Les représentations de la féminité glamourisée existent dans de nombreux médias et autour de nous, de sorte que pour un jeune homme, la porte d’entrée vers la dysphorie de genre pourra être un média totalement différent et peut se produire à différentes étapes de la vie. [Comme les jeux vidéo, les univers persistants, les RPG, les jeux de rôles, etc., tout ce qui demande et rend possible un engagement continu de l’individu, jusqu’à le couper du monde extérieur. NdT]
Je soupçonne que l’histoire que je relate ici ne s’applique pas seulement aux hommes transidentifiés obsédés par les animes, mais à beaucoup d’autres. Il est possible que le même phénomène général explique la dysphorie de nombreux garçons plus jeunes, et pas seulement des adolescents.
D’une manière ou d’une autre, nous devons abolir le genre si nous voulons lutter contre ce problème. D’ici là, attendez-vous à voir davantage de jeunes hommes qui détestent leur corps [et qui haïssent les filles réelles. NdT] au point de rechercher des interventions médicales, et qui vont entrer en état de crise existentielle à la moindre suggestion de votre part qu’ils ne sont peut-être pas littéralement des filles.
[Crise existentielle et violente rage narcissique. Que ces garçons soient tristes et doux comme l’auteur, ou violents et débordant de haine comme le dernier exemple, il s’agit de garçons psychotiques, qui n’ont plus de lien à la réalité et qui sont en état dissociatif. La dysphorie de genre n’est pas une identité, c’est une maladie mentale. NdT].