Traduction commentée d’un article qui traite du comportement des masses face aux idéologies totalitaires. Toute ressemblance avec une situation actuelle n’étant pas fortuite. Mes commentaires sont entre crochets.
Le récit du « génocide » est actuellement employé par les militants trans. D’éminentes figures médiatiques, qui pratiquent elles aussi le Ketman, parlent de « déplacement de population » et de « réfugiés ». https://twitter.com/Fausto_Sterling/status/1668793845335597056
Article par Colette Colfer paru sur the Critic le 9 juin 2023.
Le Ketman est un jeu d’acteur qui consiste à se conformer, en apparence, à un système de croyances dominant tout en le rejetant intérieurement. Le Ketman est une forme d'autoprotection, en particulier lorsque l'on vit sous un régime religieux strict ou totalitaire. Aujourd'hui, la performance de Ketman est employée pour dissimuler les véritables opinions sur l'idéologie du genre.
J'ai découvert le concept du Ketman pour la première fois au travers des mots édifiant de Csezlaw Miłosz, dans son livre de 1953, La Pensée captive: Essai sur les logocraties populaires, qui raconte la vie en Pologne sous le contrôle totalitaire de la droite nazie et de la gauche stalinienne. Miłosz consacre un chapitre entier à Ketman. Pratiquer le Ketman, c'est porter un masque, simuler un comportement obligé pour pouvoir se fondre dans la masse et éviter les conséquences d'une prise de parole contre l'idéologie dominante.
Lorsque le syndicat britannique des universitaires et des maîtres de conférences, l'University and College Union, a publié le mois dernier la vidéo de son congrès de 2023, on voyait une salle bondée de personnes scandant avec véhémence et à l'unisson « les droits des transgenres sont des droits de l'homme » [pour une fois, je ne corrige pas avec « droits humains » parce que « droits de l’homme » est exact]. Ils brandissaient des pancartes de couleur rose sur lesquelles était écrit en majuscules « TRANS RIGHTS ARE HUMAN RIGHTS » (« les droits des trans sont des droits de l’homme »). Je me suis demandée, devant un tel spectacle, combien de personnes présentes à ce congrès pratiquaient le Ketman.
Miłosz a découvert l'idée du Ketman dans un livre du comte Joseph-Arthur Gobineau (1816-82), intitulé Religions et philosophies dans l'Asie centrale. Gobineau était un diplomate français vivant en Perse au milieu du XIXe siècle, et il estimait que la population perse pratiquait le Ketman en masse. Gobineau a également parlé du « lexique d'Allah », qui comprend des expressions telles que inshallah et mashallah, et a insisté sur le fait qu'à peine un Persan sur vingt croyait à ce qu'il disait.
Bien que Miłosz considère Gobineau comme un « écrivain dangereux » [parce que c’est un théoricien qui formule une tentative de disqualification du racisme (nous sommes nous métissés) tout en partant d’une prémisse stipulant la hiérarchie des races, et dont certains aspects de ses écrits ont alimenté le nazisme], il a reconnu la description du Ketman de Gobineau dans le comportement des gens en Pologne sous le régime stalinien. La personne qui pratique le Ketman doit garder le silence sur ses véritables convictions et doit parfois recourir à la ruse pour tromper ses adversaires. Ce peut être le fait de participer à des rituels, d'agiter des drapeaux et porter des bannières, de prononcer des mots ou des phrases pour tromper les autres et d'écrire des livres contenant des idées auxquelles les auteurs et autrices elles-mêmes ne croient pas.
Miłosz a déclaré qu'il existait de nombreuses variétés de Ketman. Les versions décrites dans La pensée captive comprennent le Ketman métaphysique, qui consiste à prétendre ne pas avoir de croyances religieuses, et le Ketman éthique, qui résulte d'une opposition intérieure à l'éthique de la « nouvelle foi » du communisme stalinien, comme le fait de dénoncer ses voisins.
La description que fait Milosz du Ketman national illustre les efforts déployés par les gens pour masquer leurs convictions profondes. Le Ketman national se manifestait en chantant haut et fort les louanges des accomplissements russes, en transportant sur soi des livres d'auteurs russes, en fredonnant des chansons russes, en dédiant des œuvres à des personnalités russes, en condamnant publiquement et ouvertement ceux qui exprimaient le désir de suivre la voie nationale vers le socialisme [notamment de Tito, et dérogeant au stalinisme], tout en ressentant intérieurement du mépris pour la Russie.
Après avoir lu La pensée captive, que je me suis procurée à la librairie du musée juif de Galicie à Cracovie, en novembre dernier, lors d'un voyage d'études sur l'Holocauste, j'ai réalisé que le Ketman est largement pratiqué dans les sociétés occidentales aujourd'hui. Cette pratique prend la forme de ce que j'appellerai le « genre Ketman ».
Le genre Ketman est un acte, un jeu, une performance. Il se manifeste de différentes manières. Ce peut être le fait de garder le silence sur l'idéologie du genre ou de prétendre tout haut, comme l'a fait récemment un universitaire de haut rang avec lequel j'ai discuté, qu'il ne savait rien des hommes et des femmes parce que son doctorat n’était pas dans le domaine des études de genre. Le Ketman peut également être pratiqué en portant des badges [de pronoms], en arborant des drapeaux [le transflag, dont l’histoire est magique], en incluant des pronoms dans les signatures de courrier électronique, en chantant (ou en écrivant) des mantras, en signant des lettres de condamnation ou en désavouant publiquement quelqu'un qui a remis en question ou critiqué l'idéologie du genre. La personne qui performe le genre Ketman cache ses véritables convictions, à savoir que le sexe biologique a une importance et que les humains ne peuvent pas changer de sexe.
Miłosz souligne que lorsqu'une personne pratique le Ketman durant une période prolongée, elle finit par ne plus pouvoir distinguer son vrai moi de celui qu'elle simule. C'est comme si elle commençait à croire au mensonge. Ce niveau d'association avec le faux self, le rôle joué, apporte cependant un certain soulagement, car la personne n'a plus à s'inquiéter de faire tomber le masque lors d'une conversation avec d'autres personnes. [En fait, « s’associer à son faux self », c’est un état de dissociation pour pouvoir survivre. Mais la personne a perdu son intégrité psychique.]
Lors de son discours à la conférence The Bigger Picture de Genspect à Killarney, en Irlande, en avril de cette année, Helen Joyce a évoqué son incrédulité lorsqu'elle a réalisé que certaines personnes étaient vraiment sincères lorsqu'elles disaient que les hommes pouvaient être des femmes. Les personnes dont elle parlait sont de véritables croyantes. Elles n'ont pas besoin de pratiquer le Ketman parce que leur croyance est réelle. Il est impossible de distinguer les vrais croyants de ceux qui pratiquent le Ketman ou de ceux qui se calquent totalement sur le rôle qu’ils ou elles jouent.
Certains de ceux qui ont protesté contre la récente intervention de Kathleen Stock à Oxford Union pratiquaient peut-être Ketman.
[Je ne décline pas au féminin. Oui, il y a des hordes de femmes qui constituent les chiennes d’attaques des hommes fétichistes. Mais celles-ci sont entièrement masculo-centrées et masculo-identifiées. C’est ce que l’on appelle les handmaiden, les soubrettes du patriarcat, les servantes des idéologies masculinistes de droite ou de gauche, sous une emprise d'ordre sociétal. De même celles qui pratiquent et font pratiquer des FGM ou anciennement en Chine, le bandage des pieds. Les hommes observateurs complaisants disent « ce sont les femmes qui s’infligent ceci et le font aux filles, c’est de leur plein gré, ce sont elles qui font perdurer ces traditions... » Tout en oubliant que c'est pour conformer leurs filles aux désirs des hommes et que ce sont eux qui demandent des filles excisées ou aux pieds bandés. Sans quoi ils refuseront de les marier. Ce sont eux qui ont le pouvoir social de définir ce que doivent être et faire les femmes, pour se conformer à leurs désirs (misogynes). Germaine Greer, par ailleurs pertinente, est à côté de la plaque sur ce sujet. Elle n'a pas lu Mary Daly. Ni de véritables récits anthropologiques qui ne soient pas la projection du sadisme et de la misogynie (passant pour du recul et de l'indifférence) de l'observateur masculin occidental. Ces femmes, la grande majorité des femmes sont entre le marteau de la misogynie de l’idéologie du genre et l’enclume de la misogynie conservatrice. Elle doivent se tenir à jouer des rôles prédéfinis que diverses classes d’hommes ont établis.]
Il est fort probable que la plupart des manifestants n'aient pas lu ce qu'ils considéraient comme le livre blasphématoire de Kathleen Stock, Material Girls. Andrew Doyle [l’auteur dernière Titania McGrath notamment, mais aussi du livre Les nouveaux puritains », non traduit, et qui est un magnifique point de vue d’homme entitré sur ce qu’il considère comme une guerre culturelle idéologique en loupant complètement ce qui est au fondement, mais soit, à quoi pouvais-je bien m’attendre ?], sur Free Speech Nation, a fait remarquer que Kathleen Stock n'était pas attaquée pour ses opinions ; elle était attaquée parce qu'elle avait eu le courage de les exprimer à haute voix.
La pratique du Ketman contribue à la spirale du silence. Elisabeth Noelle-Neumann, qui a développé la théorie de la spirale du silence, a suggéré que la motivation des gens pour exprimer leurs véritables opinions sur des questions morales controversées est liée à la perception de la popularité ou non de ces opinions. Si une idée est perçue comme impopulaire, la personne la taira souvent pour se protéger du risque d’exclusion sociale. Parfois, des idées qui semblent extrêmement populaires sont secrètement combattues par la majeure partie de la population.
Le marchand de légumes dans le célèbre essai de Vaclav Havel Le pouvoir des sans-pouvoirs est un autre exemple de personne pratiquant le Ketman. Le commerçant place dans sa vitrine une pancarte avec l'inscription « Travailleurs du monde, unissez-vous ! ». C'est une façon pour le commerçant de se présenter comme quelqu'un qui se conforme à l'idéologie requise. Afficher le slogan, c'est participer à la mascarade.
L'état d’esprit Ketman peut s’avérer nécessaire pour s'assurer d’un statut social ou ne pas perdre son emploi. Les gens ont des enfants à nourrir et des crédits à payer. L’une des manières par lesquelles ils tentent de combler le fossé entre leur performance de Ketman et l'expression honnête de leurs opinions est d’utiliser des comptes anonymes sur les réseaux sociaux. Ils pratiquent une version de Ketman tout en exprimant leurs véritables opinions derrière le masque de l'anonymat.
Le genre Ketman peut vous faciliter la vie dans les moments difficiles [mais à quel prix ? C’est surtout le silence des pantoufles que nous entendons]. Une opposition ouverte à l'idéologie du genre, ou même une critique modérée de cette idéologie peut conduire à de nombreuses difficultés. Sans Ketman, l’on peut se retrouver vulnérable et risquer l’ostracisme. Des personnes qui ne jouent pas le rôle de genre Ketman ont perdu nombre de leurs ami·es, leurs emplois, ont été condamnées publiquement, ont été exclues de leurs études [sujet ou thèse de doctorat refusée, refus de sujet d’études, etc.] ou de cercles littéraires ou artistiques. Bien qu'il soit impossible de savoir combien de personnes performent le genre Ketman, je soupçonne que sa pratique est très largement répandue. Aucun être humain ne peut changer de sexe. Garder le silence à ce sujet, croire réellement que c'est possible ou pratiquer le genre Ketman ne peut pas changer la vérité qui existe indépendamment des mots.
Fausto-Sterling fait partie des propagandistes influentes de la pseudo-science du transgenrisme, notamment par son « silence ». C’est à elle que les militants trans doivent le mythe des cinq sexes. Bien que dans le livre éponyme, elle dit avoir utilisé l’exagération et l’ironie, les hommes paraphiles, faisant feu de tout bois, on eut l’attention sélective. Et Fausto-Sterling de ne pas trop rappeler haut et fort qu’en réalité, c’était une métaphore, qu’elle ne pensait pas que les gens seraient à ce point stupides. Est-ce une sorte de pratique du Ketman ? Laisser planer une mécompréhension sur quelque chose que vous auriez dit ou écrit, parce que cela vous apporte de la reconnaissance sociale et de l’argent ? J’appellerai plutôt ceci faire un « Butler », mais cela n’engage que moi.