NdT : Quand l’Inceldom rencontre l’idéologie du genre
Aujourd’hui je vous présente la traduction commentée d’un article de Sanjana Friedman au sujet de la communauté des incels « transmaxxeurs ». Il s’agit de jeunes hommes solitaires et désœuvrés, généralement — mais pas toujours — dépendants de la pornographie (ils le deviendront malheureusement en chemin), qui partagent très souvent une sous-culture des animes japonais, et qui n’existent au départ qu’au travers d’une communauté virtuelle. Ils décident ensuite d’effectuer une transition sociale et semi-médicale avec la prise d’hormones sur ordonnance, se refilant des combines pour feindre une dysphorie sexuelle et obtenir un diagnostic, et se fréquentent ensuite les uns les autres pour des relations sexuelles « en tant que femmes. » Ces jeunes hommes représentent des cas d’autogynéphilie directement induite ou renforcée par une niche de sous-culture virtuelle : ils s’autoconditionnent mutuellement, comme leurs aînés avec le sissy-porn, à se « féminiser » et pensent que la castration chimique par la prise de bloqueurs d’androgènes et l’injection d’œstrogènes soulagera leur « besoin » inassouvi de relations sexuelles et leur obsession des femmes.
Au lieu de s’attaquer au cœur de leur problème, de trouver une aide thérapeutique et de chercher à s’épanouir dans le monde extérieur en fréquentant des êtres humains, ces jeunes hommes isolés vont au contraire s’enfoncer plus encore dans leur obsession sexuelle et développer des paraphilies et des fétichismes ancrés. Au lieu d’employer leurs ressources psychiques au développement de leurs qualités humaines et rencontrer des femmes, ces hommes préfèrent blâmer les femmes de tous leurs malheurs (le manifeste transmaxxeur est un pur produit de la manosphère), s’enfermer plus encore dans leur univers virtuel et modifier leur corps (sans pénectomie, évidemment) de manière à pouvoir à terme, toucher leur corps « féminisé » ainsi que celui d’autres hommes eux aussi féminisés et se con-masturber avec leurs pairs.
Voici le « transmaxxing », le fait de maximiser ses chances de rapports sexuels par le fait de « transitionner ». C’est un tout nouveau genre de kleptogamie humaine. Il s’agit d’auto-kleptogamie, de kleptogamie avec inversion de l’identité de la cible érotique : le fait de prétendre d’être de l’autre sexe, et la validation mutuelle de la prétention similaire d’un congénère en ayant des rapports sexuels avec lui.
La civilisation patriarcale produit des conditions fascinantes.
Sanjana Friedman, qui écrit pour Pirate Wire et Le Stanford Daily s’est entretenue avec plusieurs « transmaxxeurs » et a lu le manifeste du Transmaxxing. Nous avons également parcouru ce manifeste de 73 pages et en discutons dans le cœur de l’article. Pour celles qui ne connaissent pas le principe : mes commentaires sont entre crochets et en italiques. Je n’emploie que les pronoms liés à la réalité objective lorsque je parle des personnes transidentifiées, c’est-à-dire, les pronoms grammaticaux corrects, et non les néo-pronoms. J’apporte une analyse critique au fils de la traduction selon mes connaissances féministes, en philosophie, en psychotraumatismes liés aux violences sexuelles, en violences masculines faites aux femmes et en paraphilies masculines.
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Transmaxxing : une ligne directe d’incel à « femme trans »
Sanjana Friedman, 3 janvier
Rédactrice de l’enfer du Metaverse
Pourquoi toute une communauté de jeunes hommes déprimés pense n’avoir plus rien à perdre et est convaincue que l’unique option pour sortir de la misère est de « transitionner ».
L’existence d’une catégorie considérable et grandissante d’hommes absolument incapables d’avoir des relations sexuelles, un fait saugrenu qui peut à première vue sembler anodin, a aujourd’hui des répercussions sur l’ensemble du pays, recoupant tous les sujets de controverse, depuis la dépendance à la technologie jusqu’à la « masculinité toxique », en passant par le crash démographique [l’autrice est une femme, mais les violences faites aux femmes et le piétinement de leurs droits ne lui semblent pas problématiques. L’inquiétude de la baisse de la natalité des pays riches est une inquiétude proprement patriarcale. Sanjana écrit probablement pour un public masculin.]. Mais plus récemment, alors que la sous-culture des célibataires involontaires (incel) s’amplifie dans l’Internet du XXIe siècle, elle est étrangement — et peut-être inévitablement — entrée en résonance avec la communauté trans. Pour faire court, imaginez que vous haïssez tellement les femmes que vous décidez d’en devenir une. [Il faut entendre : imaginez que vous haïssez tellement les femmes que vous décidiez de performer les stéréotypes sexistes misogynes dans lesquels vous baignez au travers de la culture pornographique.]
Aujourd’hui, face au tsunami de jeunes hommes incels qui décident de « devenir des filles » et d’entretenir des relations entre eux, avec des traitements anti-androgènes en tant que mesure de défense contre la libido [pornographiquement formée et renforcée] d’un homme et le « pouvoir des femmes » [L’idéologie Incel soutient que les femmes dirigent le monde et sont au pouvoir derrière les puissants qu’elles manipulent grâce à leur magie sexuelle], et avec la consommation de porno-hypno pour « forcer » les hommes à « se féminiser », Sanjana Friedman est l’invitée de Pirate Wires pour une incursion sauvage aux côté de la nouvelle créature la plus étrange et la plus fascinante de l’Amérique : l’incel transmaxxer [à court d’himpathy, nous aurions plutôt dit « la créature la plus pathétique » des Internets.]
Attachez vos ceintures.
Solana, de Pirate Wire
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Imaginez que vous êtes un jeune homme déprimé dans un pays développé. Vous travaillez peut-être de longues heures pour un faible salaire, vous êtes peut-être au chômage [Imaginez que vous êtes une jeune mère ayant fui un conjoint violent]. Lorsque vous étiez à l’école, vous ne vous entendiez pas avec les autres garçons ; les filles faisaient comme si vous n’étiez même pas là. Vous passez la plupart de votre temps libre à jouer aux jeux vidéo et à faire du shit-posting en ligne avec des amis virtuels que vous n’avez jamais rencontrés dans la vie réelle. Vous avez rarement des relations sexuelles sans payer [vous êtes un acheteur de viol tarifié. Vous payez pour violer des femmes précaires, dont la jeune mère célibataire ci-dessus]. Vous pensez régulièrement au suicide. Pour la gauche, vous êtes une menace : un incel qui déteste les femmes et qui a des tendances violentes latentes. Pour la droite, vous êtes un dégénéré : un « puceau » faiblard, malade du porno, qui lutte pour s’imposer dans le monde. [Les femmes de gauche pensent aussi que vous êtes malade du porno]
Alors, qu’allez-vous faire maintenant ? [Simple suggestion : vous essayez de cultiver votre humanité et d’aller dans le monde extérieur rencontrer de vraies gens ? Vous vous inscrivez dans un club de dessin, de fitness, de lecture ? Non, vous avez été élevé comme un garçon, tout doit vous être servi. Pas question de travailler sur vous. Alors vous décidez de vous faire pousser des moobs pour pouvoir tripoter votre graisse de poitrine sans avoir à vous épanouir en tant qu’être humain.] Est-ce que vous rejoignez les SJWs (social justice warriors), ou ales chads [les prétendus « beaux gosses » entre douze guillemets de la manosphère/Extrême droite] ? Est-ce que vous succombez à la tentation du suicide ?
Pour certains de ces jeunes hommes, la solution au désespoir de vivre dans un malheureux esseulement est simple : devenir une femme [performer un stéréotype misogyne]. Ils se font appeler « transmaxxers » et pensent que la « transition de genre » peut être un outil efficace pour échapper à la misère du célibat involontaire, de l’isolement social et de la médiocrité professionnelle. Plus largement, ils considèrent la transition comme une réponse potentiellement révolutionnaire dans un monde où la conjonction de l’industrialisation et des technologies biomédicales de reproduction comme la fécondation in vitro et le don de sperme ont érodé les opportunités financières et reproductives auparavant accessibles à la plupart des hommes [autrement dit, le fait que quantité de femmes en Occident n’aient plus à dépendre du pouvoir économique d’un homme pour survivre — et n’ont donc aucune raison de se forcer à se lier à un homme qu’elles ne désirent pas — a considérablement réduit les opportunités patriarcales des hommes pour exploiter sexuellement ces femmes. Ils vont donc sexuellement exploiter des femmes précaires par le biais du viol tarifié. Le fait que les hommes doivent maintenant être désirables pour les femmes en devant acquérir des qualités humaines de base qu’ils n’ont jamais eu à développer rend dès lors ceux-ci misérables]. Comme de nombreux mouvements révolutionnaires, ils opèrent de manière semi-clandestine, préférant Discord à Twitter et YouTube, et expriment leurs convictions principalement sous la forme de manifestes. Le dernier en date, un document de 73 pages publié en avril 2022, comprend des chapitres intitulés comme les exemples suivant :
« Comment la société bénéficie des personnes transidentifiées »— « [les incels] deviendront moins susceptibles de développer ou de maintenir des croyances politiques problématiques ou de devenir violents, ils bénéficieront plutôt d’une hypergamie et d’un gynocentrisme accélérés ». [L’idéologie incel soutient que les hommes vivent en matriarchie autoritaire, que les féministes ont secrètement le pouvoir, d’où le fantasme gynocentriste. Ils pensent que les féministes les accepteront comme des femmes et que des lesbiennes pourront vouloir coucher avec eux.]
« Comment transitionner » — un processus en 13 étapes qui implique, entre autres, de regarder des animes et du porno hypno pour provoquer une dysphorie, de sauvegarder son sperme en banque et de commencer un traitement hormonal de substitution.
« Les femmes transgenres ont des rapports sexuels bien meilleurs que les “Chad “[Les misogynes d’extrême droite qui font du crossfit et qui cachent leur absence de mâchoire sous une barbe bien taillée, ou qui héritent de la fortune de leur père colonialiste] — « [sous œstrogène] vous aurez des orgasmes multiples et complets ».
[Le manifeste est un complet tissu de mensonges et de fantaisies destinées à des hommes incultes, ignorants et misérables, qui prétend que la prise d’hormones avant 18 ans réécrit entièrement les cellules du corps en cellules « femelles » et que les jeunes hommes transidentifiés qui effectuent une transition médicale le plus tôt possible deviennent vraiment des femmes. Les affirmations ne peuvent pas être dites de l’ordre du pseudo-scientifique tant elles sont grotesques. Tout y est grotesque. Ils pensent aussi que ces hommes peuvent maintenant réellement produire du lait et allaiter. Le mensonge éhonté est fréquemment employé pour tenter de discréditer les travaux scientifiques et se targue de « débunker » les études qui ne vont pas dans le sens de l’idéologie du genre, avec un focus sur l’autogynéphilie, qu’il leur faut à tout prix discréditer étant donné qu’ils en sont atteints. L’autogynéphilie se trouve dans le DSM-5 parmi les conditions mentales dites « inversions de l’identité de la cible érotique », recoupant le fétichiste de travestissement, l’auto-pédophilie, etc.) Les seules études qu’ils brandissent à bon escient sont celles qui visent à protéger leur pénis. En effet, le manifeste déconseille fortement la chirurgie de réassignation sexuelle. Étant donné que leur but est de pouvoir continuer à se branler, mais maintenant en tripotant leurs tissus mammaires excédentaires induits par la prises d’œstrogènes, et pouvoir avoir des relations sexuelles avec des hommes tout comme eux déguisés en stéréotype misogyne, bien sûr que la dernière chose qu’ils veulent, c’est perdre leur pénis. NdT]
Schéma en page 20 du manifeste Transmaxx.
[Comme vous pouvez le constater, à droite, l’image que les incels envisageant la transition sociale et médicale se font des (trans)femmes, avec entre autre : « vie littéralement ses fantaisie sexuelle 24/24 et 7j/7 ; ça marche, ces nichons sont réels, trop bien les hormones qui arrivent d’Ukraine ; une des minorités les plus oppressées au monde, les femmes et les gauchistes vont vous adorer. Nous aimerions apprendre un jour que ce manifeste a été rédigé par un gros troll, malheureusement, l’autrice s’est entretenu avec lui et cet homme est très sérieux.]
Le Discord Transmaxxing, qui compte plus de 1 200 membres, comprend des hommes qui ont effectué une transition, d’autres qui sont simplement curieux et d’autres encore qui se situent dans l’entre-deux. Certains membres du Discord sont là simplement parce qu’ils ont un penchant pour la « féminisation forcée », une forme de jeu de rôle sexuel dans lequel un homme est [progressivement] forcé d’endosser une apparence et un rôle sexuel stéréotypiquement féminins. Mais Vintologi, un administrateur de leur groupe Discord, ainsi que le compilateur du manifeste pour le transmaxxing, m’a dit que « la plupart des membres actifs semblent être sous THS (hormone replacement therapy/traitement hormonal substitutif) » [Un traitement hormonal substitutif vient se « substituer » aux hormones que le corps produit naturellement, dans le cadre d’un déséquilibre hormonal ou d’une aide au passage de la ménopause. Ces hommes qui prennent des œstrogènes ne remplacent pas des hormones que leurs corps est censé produire. Ce sont des hormones exogènes opposées aux hormones que produisent leurs corps mâles au développement sexué normal. L’emploi de l’expression médicale « traitement hormonal substitutif » est fallacieux. Il s’agit de langage idéologique.] Et bien qu’il insiste sur le fait que « la plupart des membres de la communauté incel sont contre le transmaxxing et que les incels ne participent pas beaucoup à nos espaces », le manifeste et les discussions sur le Discord suggèrent que de nombreux transmaxxers s’identifiaient auparavant comme des incels. Le chapitre « récits de transmaxxings réussis » (« Transmaxxing success stories ») du manifeste atteste de l’existence de ce toboggan Incel-to-transmaxxers [la « transition » d’hommes incels à hommes transidentifiés transmaxxers] :
« Il y a 4 ans, j’étais un adolescent énervé, de droite, anti-SJW, limite MGTOW [Men Going Their Own Way[1]]. Maintenant, je suis une catgirl gay [un homme qui s’identifie en chat femelle (issue des dessins animés japonais et en lesbienne] qui sort avec une transgirl anarchiste [un homme qui s’identifie en stéréotype de fille et d’anarchiste]. »
« J’étais surtout plus un transphobe à tendance incel qu’autre chose. Quand je regarde en arrière, ça me dégoûte un peu, mais maintenant je suis bien dans ma peau. Honnêtement, je me demande combien d’incels sont dans le déni de leur transidentité. »
[Le déni de leur envie des femmes. Ils haïssent les femmes parce qu’ils désirent à la fois les posséder et les incarner. C’est le principe de la womb-envy (envie d’utérus) masculine, au fondement de toute organisation patriarcale. L’exploitation des femmes sous toutes ses formes (sexuelle, reproductrice, émotionnelle, domestique) est la résultante de cette envie masculine et de la crise existentielle que ces hommes ressentent du fait d’être fondamentalement incapables de donner la vie. Ils se perçoivent ainsi comme inutiles et bons à rien. Les femmes sont souvent conditionnées par l’éducation, la société et l’ensemble de la culture, à les materner et à faire passer les sentiments et états d’âme de ces hommes avant leur propre sécurité, et c’est aussi pourquoi ces hommes ne cherchent pas à développer des qualités humaines. Ils ont le sentiment que l’attention des femmes leur est due. Lorsque cette attention ne vient pas, ils s’enfonceront un peu plus encore dans leur obsession sexuelle, dans la dépression et développeront des pathologies mentales.]
« J’avais l’habitude de fréquenter les cercles d’incels boutonneux sur 4chan. Maintenant mon nom est Rebecca et je suis une fille. Quand est-ce qu’une telle chose s’est produite ? »
Ici dans le manifeste, et ailleurs sur les forums transmaxx, la tonalité est généralement un étrange mélange d’ironie et de sérieux. Le manifeste est composé à parts égales de conseils sobres sur la façon de se procurer et de doser les œstrogènes, et de descriptions pornographique sur la féminisation. Extrait du texte :
« Votre pantalon sera baissé et bientôt vous sentirez une aiguille percer votre muscle. L’injection, le valérate d’œstradiol, sera lentement absorbé par votre corps. Au début, ce n’était que quelques pilules administrées par voie orale, maintenant ce sont des injections. À ce stade, il est très difficile de cacher les seins. »
Où s’arrête le fétichisme et où commence l’identité ? [Si proche. En fait, il n’y a pas de différence. Ce sont des hommes paraphiles ou pseudo-paraphiles ravagés par la culture porno et animée] C’est souvent difficile à dire. Kat_the_Vat, Youtubeur et membre du Discord transmaxx, soupçonne que les passages pornographiques du manifeste (et, en particulier, la description de fantasmes de féminisation forcée) ont un but pratique pour les aspirants transmaxxers.
[« féminisation forcée » par les vêtements hyper-genrés en page 19 du manifeste]
« Certains incels ont besoin d’être forcés (à poursuivre la transition) parce qu’ils ont toutes ces contraintes mentales de leur entourage qui leur disent "tu ne peux pas être une fille parce que tu es un homme" (…) "tu ne peux pas faire ça à cause de ton pénis" », m’a-t-[il] dit. Mais au fur et à mesure de leur transition, ils se disent : "Je n’ai plus besoin de lire [la partie porno du manifeste], je vais passer directement à la partie sur les médicaments". »
[Ces hommes se conditionnent donc à « transitionner », même lorsqu’ils déploient des défenses psychiques et ont des doutes. Il s’agit d’un acte de déplacement édifiant. Encore une fois, au lieu de s’attaquer à leurs véritables problèmes, ils déplacent ce travail sur l’idée de la transition. Ils restent ainsi dans leur environnement virtuel toxique et s’y enfoncent. Il y a effectivement ici un profond mal-être.]
Le discours progressiste dominant sur la nature de la dysphorie et des identités trans [de l’idéologie du genre soutenant la notion subjective et quasi religieuse de l’existence des «identités de genre »] ne voit pas d’un bon œil l’idée que le porno puisse convaincre les [hommes] de transitionner, ou que la dysphorie de genre puisse être induite. Si, pour certains hommes, la transition peut être, comme l’a dit Kat, « une voie vers la désincarnation[2] » — ou, en pratique, un moyen pour « deux jeunes incels [de] faire une transition et de sortir ensemble », comme l’a décrit Vintologi — alors que devient l’affirmation de la WPATH (Association mondiale professionnelle pour la santé des transgenres) sur le fait que l’identité de genre est « le sentiment intrinsèque d’une personne d’être un homme (un garçon ou un homme), une femme (une fille ou une femme) ou un genre alternatif (demigirl, demiboy, transgenre, queergenre, eunuque) ? » Le fait que les personnes trans soient tout simplement du genre qu’elles prétendent être [qu’elles « possèdent » une « identité de genre » subjective en désaccord avec la réalité de leur corps sexué] sous-tend de nombreuses pratiques contemporaines essentielles [dans tous les sens du terme] liées au genre, de la prescription de bloqueurs de puberté aux enfants dysphoriques, et jusqu’au tour de déclaration des pronoms en début de réunions.
En page 18 du manifeste du transmaxxing
[Encore une fois, on retrouve le charadesign typique des animes japonais, avec la représentation d’un personnage censé être une jeune fille sexuellement soumise et disponible : le bras sur l’image est celui d’un homme qui lui enfonce le pouce dans la bouche. Il est à noter que le jeune incel est dépeint en train de dire « Je hais les filles » tandis que son alter ego « féminisé » annonce fièrement « aimer les garçons ». Il s’agit tout bonnement d’homosexualité dans ce cas de figure, et donc, de thérapie de conversion des homosexuels.]
Le transmaxxing n’est pas non plus nécessairement compatible avec le point de vue critique de l’identité de genre [c’est le moins que l’on puisse dire], du moins pas si ce point de vue considère que le principe de l’affirmation du genre est toujours un désastre physique et psychologique pour ceux qui la poursuivent [Le point de vue critique de l’idéologie du genre considère que la notion d’identité de genre est absurde et plus dangereuse encore que celle de « signe astrologique » (en ce qu’elle vient remplacer le sexe, notion objective et identifiable, par une notion subjective et idéologique). Le point de vue critique considère qu’il y a des corps sexués réels, et que le reste relève de la personnalité et des stéréotypes sociosexuels. Qu’aucun enfant n’est né dans le mauvais corps, mais qu’ils sont en revanche nés dans une mauvaise société qui refuse que les individus aient des goûts et des personnalités qui sortent des cases rigides qui leur sont imposés selon leur sexe. Sous cette perspective, la médicalisation et la mutilation des corps sains est une aberration]. Le manifeste et le Discord sont remplis de récits personnels prétendant avoir radicalement amélioré leur vie en prenant des hormones et en subissant des opérations [cosmétiques] de féminisation.
[Oui. Ces récits sont partagés à quelques mois de transition, voire à quelques années, et non au long terme, comme le rapporte l’étude suédoise menée en cohorte sur 30 ans après la transition, et qui dément formellement ces affirmations. NdT]
Comme le dit un transmaxxer, la transition « c’était comme passer d’un film sans son ni couleurs à un film en 4K avec un système de son 6.1. J’adore la sensation des orgasmes maintenant que je suis une fille, je ne pensais pas que le sexe serait aussi bon [sic]. » [Ou la méthode Couet appliquée à la branlette.]
Pour Tina, un transmaxxeur allemand de 23 ans qui vit « en tant que femme » depuis un an, la transition a été une « solution à l’inceldom » [Le royaume Incel, le statut social d’incel (incelhood)]. Après avoir essuyé un « rejet [romantique] particulièrement difficile », qui déjà faisait suite à « une succession de râteaux », [il] a commencé à étudier « certains schémas comportementaux des relations hommes femmes. » Tina est arrivé à deux conclusions cruciales : premièrement, les hommes sont remplaçables du point de vue de la reproduction, et deuxièmement, « un homme sur 20 est condamné à devenir incel » en raison du déséquilibre du rapport des sexes à la naissance (en moyenne, 105 garçons naissent pour 100 filles, bien que ce rapport varie selon les pays [en fonction de l’avortement sélectif des fœtus filles, des infanticides de bébés filles. Les filles sont non désirées dans les sociétés viriarcales traditionnelles et c’est la cause directe du déficit planétaire de filles et de femmes estimé à 200 millions de femmes manquantes en 2025. etc.]).
À ce stade, Tina s’est dit qu’[il] était [lui]-même un incel et a décidé qu’[il] devait « supprimer le pouvoir sexuel que les femmes avaient sur [lui] » en réduisant sa libido. Lorsqu’[il] a appris que les anti-androgènes, qui suppriment la production de testostérone, sont souvent prescrits aux femmes transgenres dans le cadre d’un traitement hormonal « substitutif » [nous mettons entre guillemets], [il] a décidé de simuler une dysphorie de genre afin d’avoir accès aux médicaments.
[Les masculinistes aiment à prétendre qu’ils existent des femmes « incels ». Comme souvent, il s’agit d’une inversion. Dans le monde réel des Occidentaux, en dehors des niches de sous-culture porn-virtuelles, il existe quantités de femmes ayant socialement réussis et qui sont physiquement très attirantes, mais qui préfèrent rester célibataires plutôt que de fréquenter des hommes porn-addicts ou des hommes médiocres qui se contentent d’assurer le minimum syndical de décence humaine (et qui seront même félicités par de nombreuses femmes habituées aux hommes abusifs). La différence notable est que ces femmes ne souffrent pas de l’absence de relations aux hommes (elles souffriraient au contraire dans le cadre de relations avec ces hommes émotionnellement atrophiés dont l’imagination « érotique » est formatée à la pornographie) et qu’elles se portent en revanche bien mieux que nombre de femmes malheureuses en couple. Or, nous sommes ici en train de parler d’hommes incels qui souffrent de leur obsession sexuelle au point de faire évoluer leur corps pour pouvoir se masturber avec d’autres hommes au corps modifiés, parce que le fait les femmes ne sont pas des ressources en libre service mais des individus à part entière rend ceux-ci misérables.]
« Je ne m’étais jamais intéressé de près ou de loin aux trucs liés aux trans avant cela », m’a dit Tina, faisant référence à l’état d’esprit qui était le sien avant qu’[il] décide de transmaxxer. Mais après avoir consulté plusieurs psychologues spécialisés dans les questions trans et après leur avoir servi une histoire de dysphorie « complètement inventée » — « l’essentiel est de dire : "Je souffre de dysphorie de genre depuis l’âge de 14 ans… Je suis mal à l’aise en présence de femmes et je les envie pour leur féminité et tout ce genre de conneries” » — [il] a pu obtenir un diagnostic de dysphorie de genre et des prescriptions d’anti-androgènes et d’œstrogènes.
« Ce n’était pas confortable de "s’habiller en femme" pour la première fois… mais maintenant c’est juste normal" », dit Tina. « Je ne me considère plus comme un incel… La réduction de la libido a fonctionné, la réduction de la dépendance aux femmes a fonctionné, le soulagement de mes problèmes d’estime de soi a fonctionné. Et j’ai même rencontré des trans sympas en cours de route. » [Il] vit à plein temps « comme une femme » depuis un an et s’est récemment rendu en Espagne pour une consultation avec un chirurgien spécialisé dans la féminisation du visage. [Pourquoi aller jusqu’à briser son corps de la sorte ?] Comme [il] a reçu un diagnostic clinique de dysphorie, le gouvernement allemand couvrira tous les frais liés à sa transition. [Il] estime que ces frais s’élèveront à environ 80 000€[3] [Pardon ? 80 000 € pour une chirurgie dangereusement inutile ? Nous retirons ce que nous avons dit sur les impôts !].
Alors que la ligne progressiste consiste à dire que l’identité de genre est innée et n’a rien à voir avec le sexe, et que l’attitude critique à l’égard du genre consiste également à dire que l’identité de genre est innée, mais qu’elle a tout à voir avec le sexe [Non, le point de vue critique du genre considère que l’identité de genre est une notion absurde qui élève un trouble mental au statut de catégorie protégée. Que le fait qu’un concept aussi absurde et sans aucun fondement objectif vienne à remplacer le sexe dans la constitution et dans les lois est le summum de l’absurdité et ne s’explique que par la misogynie sociétale et l’indulgence que les gouvernants ont pour la sexualité masculine, dont les nombreux fétichismes se cachant derrière l’idéologie de l’identité de genre], le transmaxxing suggère qu’une série de facteurs peuvent influencer la décision [d’un homme] à s’identifier comme trans et/ou de poursuivre une transition : la dysphorie de genre (induite ou non) ; les fétiches sexuels (l’autogynéphilie, dont le manifeste fait la promotion en encourageant les transmaxxers à développer cette condition mentale) ; le manque de certaines caractéristiques sociales ou physiques hautement valorisées dans la masculinité [viriarcale] (avoir un gros pénis, être grand et fort, s’affirmer, réussir financièrement). Le transmaxxing adopte une approche transhumaniste de la transition, suggérant, selon les mots de Kat, que les hommes malheureux vont se demander « est-ce que les œstrogènes et les anti-androgènes peuvent améliorer ma vie ? La question n’est pas tant "oh, suis-je un garçon ou une fille à l’intérieur ?" pas plus que "suis-je coincé [dans le mauvais corps]"… C’est plutôt "est-ce que je veux prendre des œstrogènes pour me faire pousser des seins ?" ».
Il est intéressant de noter que la plupart des discours transmaxx n’ont pas grand-chose à dire sur les femmes transidentifiées qui veulent devenir des hommes [Elles ne peuvent pas devenir des hommes, seulement performer la masculinité sociale]. Vintologi affirme qu’il « interdirait complètement la transition FtM [femme-homme]… pour le bien de la société », citant cinq raisons pour cela :
[Vintologi est un homme masculiniste misogyne qui refuse que les femmes dysphoriques vivent « comme des hommes » parce que : 0. c’est délétère pour le taux de fertilité (en bon patriarcal, il veut exercer un contrôle sur le corps des femmes) ; 1. Les FTM font empirer le problème des incels (ces femmes échappent à l’hétérosexualité et ne sont donc pas utilisables sexuellement par les incels qui pensent qu’un de leurs principaux problèmes est qu’il n’y a déjà pas assez de femmes disponibles pour eux, et non que leur principal problème vient du fait qu’il sont des hommes entitrés et sous-humanisés qui pensent que les femmes sont des ressources « disponibles ».) 3.Les transitions FtM semblent avoir des résultats pires que les MtF dans les études (encore une fois, il sélectionne ce qui l’arrange). 4. Les transitions FTM repose sur des chirurgies irréversibles comme les mastectomies qui laissent des cicatrices permanentes (ces hommes sont des obsédés des nichons, c’est un sacrilège qu’une femme ose couper les siens pour… Échapper aux hommes obsédés des nichons. Cet homme ne se fait pas du souci pour ces femmes, il est juste haineux de ne pas pouvoir les contrôler). Les effets de la testostérone sont plus difficiles à se résorber (il a raison sur ce point, la prise de testostérone laisse des traces irréversibles, sur la voix, la pilosité (calvitie, etc.), les os.]
D’une certaine manière, le transmaxxing semble être une réponse plausible, bien qu’extrême, à ce que Mary Harrington, s’inspirant de N.S. Lyons — qui à son tour s’inspire de Christopher Lasch — appelle la « guerre des cultures et des classes entre les "physiques" et les "virtuels" ». C’est-à-dire entre ceux qui évoluent dans le monde matériel [réel ?] et ceux qui évoluent « à un niveau d’abstraction séparé du monde physique » (par exemple, la finance, les médias, la technologie, le monde universitaire) [et je rajouterais tous les fidèles des religions et des spiritualités dualistes qui croient en un monde des idées supérieur au monde réel et sensible. La peur de la vie (biophobie), de la chair et la haine des femmes (qui représentent le « corps de chair » en opposition en l’esprit rationnel masculin) découlent généralement de ces spiritualités patriarcales. Le monde virtuel et les cultures masculinistes sur Internet ne sont en rien différentes. NdT]. Selon Harrington, la désindustrialisation a donné aux Virtuels un avantage décisif sur les Physiques et, dans de très nombreux cas, a privé les Physiques d’opportunités de mobilité financière et sociale. [Degré 0 de l’analyse des rapports de classes en société techno-capitaliste].
Une analyse similaire semble être sous-jacente aux revendications du manifeste pour le Transmaxxing, qui conçoit les hommes comme étant pour « la plupart déjà obsolètes » car « leur corps n’est plus nécessaire pour le travail physique et les hommes en tant que groupe n’ont pas d’avantages mentaux majeurs par rapport aux femmes » [disons qu’ils n’ont aucun avantage mental par rapport aux femmes, sinon la tendance à la sociopathie, qui est récompensée dans notre société — société d’homme créée par et pour les hommes]. Mais alors que certains (comme Harrington et Lyons) considèrent le triomphe du monde virtuel sur le monde matériel comme un problème à résoudre, les transmaxxers le voient comme inévitable. Comment s’adapter à une société où l’immatériel prend le pas sur le concret ? La réponse des transmaxx est la suivante : embrasser les abstractions, « descendre dans le vortex rose » et se refaire avec l’aide de la technologie. Comme l’a dit un utilisateur du Discord à un nouveau membre solitaire et déprimé qui se demandait s’il devait transmaxx,, « autant faire la transition, il n’y a rien à perdre ». [Ces hommes ne sont définitivement pas près pour le réchauffement climatique.]
Sanjana Friedman
Note de l’autrice : Quelques détails superficiels de cette histoire ont été modifiés à la demande des sujets.
[1] Des hommes qui évitent les relations avec les femmes et vivent en marge de la société dominante, qu’ils considèrent comme corrompue par le féminisme. [Personnellement, je les soutiens dans leur démarche. NdT]
[2] [« Ne pas “se ressentir” comme étant qui ou ce qu’on est, comme “appartenant” à notre propre corps sexué. Cela évoque fortement le “trouble de dépersonnalisation”, une forme de trouble dissociatif bien connu des psychiatres : “Lors de la dépersonnalisation, c’est en revanche l’existence et l’appartenance de son propre corps que l’on remet en question : le corps devient étranger à l’individu”. » Nicolas Casaux]
[3] J’ai vérifié l’histoire de Tina lors d’une conversation vidéo avec [lui], au cours de laquelle [il] m’a montré sa carte d’identité allemande, une ordonnance valide d’œstradiol délivrée par un pharmacien, sur laquelle figurent son ancien nom, son adresse et ses coordonnées, une lettre d’un psychologue recommandant un traitement hormonal, sur laquelle figurent son ancien et son nouveau nom, et la preuve de sa récente visite chez un chirurgien esthétique en Espagne : le dossier de consultation, une décharge de responsabilité portant son nouveau nom et un scanner de sa tête, sur lequel figure son nouveau nom. En outre, j’ai noté que son apparence correspondait à celle d’une « femme transgenre » qui prenait des œstrogènes depuis au moins plusieurs mois.